LA CAMPAGNE DE MAI 1940 EN
BELGIQUE: LA 5e DIVISION LEGERE DE CAVALERIE FRANÇAISE (5ème DLC) EN ARDENNE, DU 10 AU 12 MAI
INTRODUCTION
Le 10 mai 1940,
premier jour de la grande offensive allemande de l'Ouest, les Français,
répondant à l'appel au secours du Gouvernement belge, lancent dans nos Ardennes
4 divisions légères de cavalerie (DLC), ainsi
que 2 brigades de cavalerie non endivisionnées (1ère BC et 3e Brigade de
Spahis), toutes renforcées par des groupes de reconnaissance des divisions
d'infanterie et des corps d'armée de la position de résistance des 2e et 9e
Armées françaises. Les grandes unités de cavalerie et leurs renforts doivent
aller à la rencontre des Allemands, le plus loin possible, pour faire ensuite
du combat retardateur afin de procurer aux forces franco-britanniques le temps nécessaire pour prendre
les mesures adéquates, compte tenu des renseignements obtenus sur les forces et
les axes d'attaque de l'ennemi.
Nous avons consacré quelques travaux
antérieurs à cette cavalerie française:
- de la 9e Armée
- 4e DLC sur les
axes Profondeville... Durbuy et Godinne... Marche, Grandménil
(1)
- 1ère DLC sur les
axes Dinant, Marche, Laroche, Bérisménil; et Hastière,
Rochefort, Champlon (2)
- 3e Brigade de
Spahis sur les axes Vresse, Graide, Daverdisse, Mirwart; et Mouzaive, Maissin, Poix-Saint-Hubert (3)
- de la 2e Armée
-1ère BC sur les axes Chassepierre...
Straimont; et Florenville... Suxy (4)
- 2e DLC
sur les axes Gérouville, Etalle, Habay-la-Neuve; et Virton...
Arlon (5).
(1) A. BIKAR: 4e DLC, in Revue Belge
d'Histoire Militaire (RBHM), n° de juin et septembre 1984.
(2) IDEM: 1ère DLC, in RBHM, n° de juin et
septembre 1985.
(3) IDEM: 3e Brigade de
Spahis, in RBHM,
n° de mars 1986.
(4) IDEM: 1ère RC, in RBHM, n° de septembre
1989.
(5) IDEM: 2e DLC, in RBHM, n° de juin,
septembre et décembre 1988.
Pour être complet, il restait à relater
les événements à la 5e DLC, sur les axes Bouillon, Libramont, Bertogne et Neufchâteau,
Petite-Rosière.
C'est cette 5e DLC qui eut la mission la plus difficile. En effet,
tandis que les 3 autres eurent affaire chacune à une Panzerdivision, la
5e DLC, le 11 mai, fut aux prises avec
les trois Panzers constituant le XIXe
Corps du général Guderian: la 2e Panzer
qui attaque Libramont, la Ire qui fonce
sur Neufchâteau, et la 10e, renforcée par
l'Infanterie Regiment Grossdeutschland (IRGD),
qui surgit au sud de Neufchâteau. Cette
10e Panzer renforcée était le 10 mai devant la 2e DLC, mais trouva celle-ci trop coriace et, faisant le
11 mai un immense détour vers le Nord-ouest, prit la 5e DLC dans son flanc droit. De plus, c'est devant la 5e DLC que les Allemands réalisèrent le 10 mai leur
opération «NIWI», c'est-à-dire
l'atterrissage, dans la région de Léglise,
Nives et Witry, du IIIe bataillon de l'IRGD,
transporté par petits avions Fieseler Storch.
Cette opération a fait l'objet d'un travail antérieur (6),
relatant les combats des Chasseurs ardennais contre les 1ère et 2e Panzers et
le III/IRGD, et les avatars des éléments
avancés de la 5e DLC. Nous reparlerons
ici de ces combats du 10 mai des Détachements de Découverte (DD) de la 5e DLC,
mais nous étudierons surtout les dramatiques journées des 11 et 12 mai à la
division.
(6) IDEM:
Opérations Herdderich
et NIWI in RBHM, n° de mars 1974 (Hedderich), septembre et décembre 1974. mars et
juin 1975 (NIWI).
A. - LA 5e DLC
1. - COMPOSITION DE LA DIVISION (voir
annexe 1)
La 5e DLC
comprend essentiellement deux brigades à deux régiments:
- la 6e Brigade de Cavalerie (6e BC): deux régiments à
cheval: le 11e Cuirassiers et le 12e Chasseurs à cheval;
- la 15e Brigade Légère Motorisée (15e BLM): le 5e Régiment d'Autos-mitrailleuses (5e RAM) et le 15e Régiment de Dragons Portés
(15e RDP).
II y a en outre: le
78e Régiment d'Artillerie (78e RA), le 5e Escadron Divisionnaire Antichars (5e EDAC), la 10e Batterie Divisionnaire Antichars (10e BDAC), la Compagnie de Sapeurs-mineurs 34/1, la Compagnie mixte de
Transmissions 34/84, diverses unités des Services.
La division, pour
son action en Belgique, sera renforcée par trois Groupes de Reconnaissance: le
12e GRCA (du Xe Corps), le 60e GRDI (de la 71e DI)
et le 64e GRDI (de la 55e DI). Elle aura en outre à sa disposition deux
bataillons d'infanterie: le I/295e RI de la 55e DI, et le III/1 2e Zouaves de la 3e DI nord-africaine (3e DINA). Elle
pourra aussi faire appel à 3 compagnies et demie du Génie du Xe Corps.
II. - LES CANTONNEMENTS LE 9 MAI, VEILLE DU PREMIER
JOUR DE LA GRANDE OFFENSIVE ALLEMANDE
Les unités de la 5e DLC sont cantonnées dans une zone d'environ 25
kilomètres de large, entre Donchery et Carignan, en avant de la position de l'infanterie du
Xe Corps, corps de gauche de la 2e Armée:
1. - UNITÉS ORGANIQUES
- QG/5e
DLC: Bazeilles
- 6e
BC: QG à Sedan (quartier Fabert)
12e Chasseurs à cheval: PC à Sedan
(Fabert); 1er escadron: Floing; 2e: Villers-Cernay; 3e: La Chapelle; 4e: Illy
11e Cuirassiers: PC à Francheval; 1er:
Francheval; 2e: Pouru-au-Bois; 3e et 4e: Escombes et Le Chesnois
- 15e
BLM: QG à Rubécourt
15e RDP: PC à Sedan (quartier Macdonald);
I: Pouru-Saint-Remy; ler: Messincourt; 2e:
Douzy; 4e: Pouru-Saint-Remy; II: Sedan
(Fabert); 5e: Fond de Givonne; 6e et 8e: Sedan (Fabert) 5e RAM: PC et escadron de chars:
Douzy; escadrons moto: Matton; groupes de
découverte: 1: Givonne; 2 et 3: Messincourt
- 5e EDAC: 2
pelotons à Pouru-Saint-Remy; 1 pel.: Fond de Givonne
- 10 BDAC:
2 sections à Rubécourt; 2 sections à Douzy
- 78e
RA: PC à La Moncelle (château); I: Daigny; II: Rubécourt
et Sachy
- 5e
Escadron de Réparation Divisionnaire: Vendresse
- Cie mixte de Transmissions 34/84: Bazeilles
- Cie
de Sapeurs-mineurs 34/1: Balan
- Cie du Génie
110/2: PC, Ire, 2e et 3e sections: Sedan
(Fabert); 4e section: Saint-Menges.
2. - UNITÉS EN RENFORT
- 60e GRDI:
PC: Messimpré; ler escadron: Pure; 2e: Clemency; 3e: Messimpré
- 64e GRDI: PC: Saint-Menges; ler: Fleigneux; 2e: Saint-Menges
- 12e GRCA: PC: Vrigne-au-Bois;
escadrons à Vrigne-au-Bois, Vrigne-Meuse et
Bosseval.
III. - MISSION DE LA 5ème DLC EN CAS D'ENTRÉE EN BELGIQUE
En cas d'entrée en Belgique, la 5ème DLC aura pour mission de:
- se porter aussi
vite et aussi loin que possible à la rencontre de l'ennemi, pour exercer sur
lui une action de retardement ... qui durera évidemment d'autant plus
longtemps que le premier contact se sera produit loin dans l'Est;
- «faire du renseignement», afin d'informer le Haut Commandement français sur les
axes d'attaque de la Wehrmacht, la nature et l'importance des colonnes;
- réaliser des destructions routières, notamment
à Recogne-Libramont et Neufchâteau.
Au départ, la 5ème DLC sera encadrée par deux brigades indépendantes, à
cheval: à l'Ouest, la 3e Brigade de Spahis (3e BS), unité de droite de la cavalerie de la 9e Armée; à l'Est, la 1ère BC, unité centrale de la cavalerie de la 2e Armée
(de la gauche à la droite: Se DLC, lère BC, 2e DLC). La
1ère BC ne devra pas dépasser la transversale Saint-Hubert, Libramont, Neufchâteau, Rulles, au-delà de laquelle les
2e et 5e DLC seront voisines directes.
IV. - SECTEUR D'ACTION, ITINÉRAIRE
ET OBJECTIFS DE LA DIVISION
La 5ème DLC doit déboucher de la Semois à Bouillon et dans la région de Florenville, et lancer des Détachements de Découverte (DD) soutenus par des Détachements de Sécurité Eloignée (DSE) vers Houffalize (par Libramont) et Bastogne (par Neufchâteau).
Le secteur d'action de la division est limité, à l'Ouest, par une ligne jalonnée
par Alle, Paliseul, Houffalize; à l'Est,
par une ligne passant par Chassepierre,
Léglise (exclu) et Fauvillers (exclu). La
division étant articulée en deux groupements (voir plus loin), la limite
latérale commune de ceux-ci sera une ligne passant à l'est de Villers-Cernay et allant jusqu'au sud de Bouillon,
puis obliquant vers le Nord-est pour passer au sud-est de Bertrix, au sud-est de Libramont, et au sud-est de Houffalize.
Les itinéraires
suivants sont prévus; de la gauche à la droite: n° l: Alle, Rochehaut, Mogimont,
Paliseul, Anloy, Glaireuse, Libin; n° 2: Bouillon,
Paliseul, Libin, Saint-Hubert, Laroche,
Vielsalm; n° 3: Bouillon, Bertrix, Libramont, Amberloup, Bertogne, Houffalize,
Saint-Vith; n° 4: Florenville, Straimont, Neufchâteau, Bastogne.
Les transversales suivantes constituent
les objectifs successifs:
0.1: Alle, Bouillon, la Semois jusqu'à Tintigny;
0.2: La Lomme entre Libin et Saint-Hubert,
Libramont, Neufchâteau, Rulles;
0.3: Bertogne,
Bastogne, Martelange.
Mais les DD et DSE devront aller au-delà de 0.3, si c'est possible.
Il est prévu qu'à l'issue de la manoeuvre
de retardement dans l'Ardenne belge, manoeuvre
qui devrait durer cinq jours, la 5e DLC passera
en réserve derrière la position principale de défense de la zone de Sedan. Les Groupes de Reconnaissance, en particulier,
devront se regrouper dans les régions suivantes:
- 12e GRCA:
Les Grandes Armoises, La Berlière
- 60e
GRDI: Sommauthe, Vaux-en-Dieulet
- 64e GRDI: La Cassine.
V. - ARTICULATION DES FORCES DE LA 5ème
DLC
Le général Chanoine,
commandant la division, articule ses forces en deux groupements (Ouest et Est),
commandés respectivement par le général Brown
de Colstoun, commandant la 6e BC, et le
colonel Evain, commandant la 15e BLM. Chacun de ces groupements est mixte, c'est-à-dire
qu'il comprendra des unités à cheval et des unités motorisées. Sur chaque
itinéraire, il y aura évidemment un prudent échelonnement en profondeur:
d'abord les DD, puis les DSE, puis les avant-gardes des Gros, ensuite les Gros
des colonnes, et enfin un deuxième échelon. Voyons cela en détail, en partant
de la gauche:
1. - GROUPEMENT OUEST: général Brown de Colsoun,
avec essentiellement le 12e Chasseurs à cheval:
ITINÉRAIRE 1 (Alle...
Libin):
- un
détachement «DD/DSE»: Lt Josset (du 3e
escadron/12e GRCA) avec
- 1 peloton d'AMR du 5e/15e RDP
- 2
pelotons moto du 3e/12e GRCA
- 1
groupe de 2 canons de 25 (Lt Martin) du
5e EDAC
- Gros: 64e GRDI + 1 section de la 3e batterie du 78e RA.
ITINERAIRE 3
(Bouillon... Libramont):
- DD.1 du
commandant Rougier (et le I/Se RAM) avec:
- 2 pelotons d'AMD du ler/Se RAM
- 2 pelotons moto du 2e/Se RAM
(une fraction de ce DD.1 passera par Saint-Hubert)
- DSE: commandant
Mouton (du II/12e GRCA) avec:
- le gros du Se/15e RDP
- des
éléments antichars
- une demi-section
moto de la Cie de Sapeurs-mineurs 34/1
(sergent chef André)
- Avant-Carde:
-
1 peloton chars du 3e/Se RAM
- des motocyclistes du 5e RAM
- la 3e batterie du 78e RA (moins la
section avec le 64e GRDI)
- Gros:
- 12e Chasseurs à cheval
- I (-3e Bie) du 78e RA
- 2 canons de 47 de la 10e BDAC
- La
section TT de la Cie de Sapeurs-mineurs 34/I
- 2e Echelon:
- II
(-5e escadron) du 15e RDP
- 1
groupe de 2 canons de 25 (du peloton Martin) du 5e EDAC
- 1 peloton de
chars du 3e/Se RAM.
2. - GROUPEMENT EST DU COLONEL EVAIN
Ce groupement est subdivisé en deux sous-groupements:
- le
Sous-Groupement Nord (ou gauche): 11e
Cuirassiers moins le IIe groupe, et I/15e RDP
- le Sous-Groupement Sud (ou de droite): II/11e Cuirassiers et 60e GRDI.
a) Sous-Groupement Nord
ITINÉRAIRE 4
(Messincourt, Muno... Neufchâteau,
Bastogne)
- DD.2: capitaine
de Canchy, du 2e/5e RAM, avec:
- 1 peloton d'AMD du 1er/5e RAM
- 1 peloton moto (Lt Toussaint) du 2e/5e RAM
- DSE
(derrière le DD.2): http://www.clham.org/, avec:
- 2 pelotons d'AMR et 2 pelotons moto du ler/15e RDP
- une
demi-section moto (lt Brunelle) de la Cie de Sapeurs-mineurs 34/1
- Avant-Garde:
- 1 peloton de chars (Guignard) du 3e/5e RAM
- des motos du 5e RAM
- 1 batterie du 78e RA
- Gros: le colonel Labouche, commandant le l le Cuirassiers, avec:
- 1 peloton de chars du 3e/5e RAM
- 11e Cuirassiers (-IIe groupe)
- IIe
groupe du 78e RA (-la batterie en avant-garde)
- 2 canons de 47 de la l0e BDAC
- la
section camionnettes de la Cie de Sapeurs-mineurs
34/1
- 2e Echelon:
- I/15e RDP (-ler escadron).
b) Sous-Groupement Sud
ITINÉRAIRE 5 (Matton, Chassepierre...
Bernimont) et ITINERAIRE 6 (Matton, ... Chiny,
Suxy, Les Fossés...): le lieutenant-colonel du Passage (et le 60e GRDI) avec: le 60e GRDI
(à droite), le IIe Groupe du lle
Cuirassiers (à gauche), 1 peloton du Se EDAC.
3. - RÉSERVES: sous le commandement du
commandant du 5e RAM: le restant du 5e RAM: 1 peloton d'AMD, 2 pelotons de chars, et 5e peloton moto; le 12e
GRCA (sauf 2 pelotons moto attribués au DD/DSE de l'itinéraire 1), renforcé par 1 section de
la 10e BDAC.
4. - L'INFANTERIE SUR LA SEMOIS: les deux bataillons d'infanterie attribués à
la 5e DLC devront constituer une position
de recueil sur la Semois: le I/295e RI derrière le Groupement Ouest, le III/12e Zouaves derrière le Groupement Est. Liaison
entre ces deux bataillons sur la partie ouest de la boucle de Han.
Coordination: par le commandant du 15e RDP.
B. - LES BELGES EN ARDENNE
Les conceptions du
Haut Commandement belge, ses velléités de modifications depuis le 13 avril 1940
jusqu'au matin du 10 mai, le dispositif des troupes, etc, ont été longuement exposés précédemment (7). En résumé, à l'aube du 10 mai 1940, il y a en
Ardenne le Groupement K (du nom du général Keyaerts,
commandant la 1ère DC, dont le QG est à Saint-Hubert) comprenant la lère DC et la 1 re
Division de Chasseurs Ardennais (1ère DChA).
(7) A. BIKAR: 10 mai 1940, « Hedderich et Niwi» , les deux opérations allemandes aéroportées sur petits avions
Fieseler Storch, in Revue Belge d'Histoire militaire, n° XX-7 de septembre 1974, pp. 600 à
608.
I. - LE
DISPOSITIF DES TROUPES
- La 1ère DC, qui
après l'exécution des ordres donnés dans la nuit du 9 au 10 mai, sera tout
entière regroupée sur la Position d'Arrière-Garde,
vaste arc de cercle appuyé à la Meuse
de Huy et à l'Ourthe de Comblain-au-Pont,
et passant par la vallée du Hoyoux,
Somme-Leuze et Petit-Han;
- Le Bataillon motocycliste de Chasseurs Ardennais, à
Laroche et Erezée, et dépendant
directement du général Keyaerts;
- La 1ère
DChA (QG à Neufchâteau): 1er, 2e et 3e Chasseurs Ardennais:
- le 3e ChA, sur la Salm, dépend directement du général Keyaerts;
- le QG/lère DChA, à Neufchâteau, n'a sous ses ordres que les 1er et
2e ChA, sans mortiers, sans artillerie,
sans canons de 47 antichars de position, mais disposant, pour la protection des
colonnes, de «T.13», c'est-à-dire de canons de 47 sous semi-coupoles, sur affûts chenillés automoteurs.
Les 1er et 2e ChA, initialement, ont déjà chacun un de leurs trois
bataillons sur la Position d'Arrière-Garde
(III/1 er ChA et 1er/2e ChA); il ne leur reste donc à chacun que 2
bataillons, ainsi que leur Cie moto (la 10e) et leurs T.13 (11e Cie, répartie).
Le 2e ChA (PC à Amberloup) occupe avec ses 2 bataillons une position
couvrant Bastogne. La 1re Cie (du III) est à Libramont.
Le 1er ChA (PC à Neufchâteau):
- a
son Ier Bataillon à Sibret (PC),
Burnon (2e Cie), et Assenois (3e);
- a
son IIe Bataillon à Fauvillers (PC). Murtelange (4e
Cie), Bodanoe (5e) et Habay-la-Neuve (6e);
- les
1ère, 7e, et 9e Cie, détachées de leurs
bataillons, sont à Arlon (1ère et 9e), et Neufchâteau (7e);
- la 10e Cie a 2
pelotons à Neufchâteau, et 1 à
Bologne (nord de Habay) pour couvrir le
repli de la 6e.
Remarques importantes
- dans la nuit du
7 au 8 mai, parce qu'il y avait Préalerte, le
puissant groupement motorisé cantonné dans la région Habay-Etalle, et qui, en cas d'alerte, devait occuper
la frontière de l'Est depuis Schockville jusqu'à
Athus, perd le 1 er Guides (6 escadrons
motocyclistes, et un 7e escadron blindé à 7 T.13 et 6 petits chars T.15),
envoyé sur la Position d'Arrière-Garde;
- et dans la nuit du 9 au 10 mai, parce qu'il y a Alerte,
le restant de ce groupement (4 escadrons du 2e Lanciers) se replie aussi;
- le 10 mai à 7 heures, le général Keyaerts donne l'ordre de repli vers le Nord des deux
derniers escadrons de la Ire DC qui se trouvaient dans le sud de l'Ardenne: les
ler et 4e du 2e Lanciers, qui gardaient la Semois, face au Sud, respectivement à Rossignol et
Bouillon.
II. - LA MISSION
Les 1er et 2e ChA, serrant sur leur gauche, se replieront par Marche
et Laroche vers la Position d'Arrière-Garde,
à Durbuy et Barvaux, c'est-à-dire en direction du Nord et du
Nord-ouest, donc perpendiculairement à la direction générale de l'attaque
allemande. Ce repli aura lieu à partir des unités situées le plus au Sud, dès
l'exécution des destructions prévues.
C. - LES PLANS ALLEMANDS AU SUJET DE
L'ARDENNE CENTRALE
Les trois divisions
blindées (du Nord au Sud: 2e, 1ère et 10e Panzer) du XIXe Corps du général Guderian ont pour objectifs respectifs, le 10 mai 1940: Libramont, Neufchâteau, et Florenville. Le IIIe
bataillon de l'«Infanterie Regiment
Grossdeutschland» (IRGD), transporté sur
petits avions Fieseler Storch, doit
atterrir à l'ouest de Bastogne, à Nives et Witry (d'où
le nom de l'opération: NIWI) pour: interrompre
toutes les liaisons entre les Chasseurs ardennais de la position frontière (Bastogne... Bodange... Martelange), et leurs
arrières; attaquer ces troupes dans le dos; empêcher les réserves (de Neufchâteau, etc.) de venir les renforcer.
D. - LA JOURNÉE DU 10 MAI 1940
I. - LES ÉVÉNEMENTS, EN ARDENNE, EN
CE QUI CONCERNE LES CHASSEURS ARDENNAIS ET LES ALLEMANDS SE TROUVANT DANS LE
SECTEUR ASSIGNÉ À LA 5ème DLC
1. - LES INTERVENTIONS DES CHASSEURS
ARDENNAIS CONTRE LES ALLEMANDS DE L'OPÉRATION NIWI
Les aéroportés ennemis ont atterri dans
trois régions: à Léglise - Rancimont, à Traimont-Witry et à Nives-Cobreville. Du côté belge, le général Keyaerts n'envoie contre eux aucune unité de l'arrière
(sur la Position d'Arrière-Garde, le gros
de la 1ère DC est déployé face à l'Ouest et va même gêner la progression des
Français vers l'Est!); et charge la 1ère DChA
de se débrouiller en prélevant des éléments de l'avant. Ce seront:
- la 10e Cie moto du 1er ChA, qui va
attaquer le groupe ennemi de Léglise-Rancimont
par le Nord (les 2 pelotons venant de Sibret),
et par le Sud (le peloton de Bologne);
- la patrouille
du lieutenant Schweicher, du II/1er ChA (2
T.13 et une dizaine de chasseurs, venant de Fauvillers),
contre le groupe ennemi de Traimont-Witry;
- la 10e Cie moto (moins ses 3 T.15 et un demi-peloton moto) et 4 T.13 dit 2e ChA, qui vont attaquer le groupe ennemi de Nives-Cobreville par le Nord, tandis que la patrouille
du lieutenant Simonet (2 T.13 et 6
chasseurs de la 2e Cie/1er ChA) venant de
Hol lange, l'attaque par l'Est.
Voyons le déroulement de ces actions.
A Léglise, les
Allemands sont bien retranchés dans les maisons. Les 2 pelotons motocyclistes
de Chasseurs ardennais et leurs deux T.15 attaquent bravement, mais aussitôt
les chauffeurs des deux blindés sont blessés dans leurs tourelles par des
éclats provenant des projectiles des fusils antichars ennemis; et plusieurs
motocyclistes sont blessés aussi. Sur ces entrefaites, les Allemands, vers 1Oh30, se replient en direction de Witry. Vers l Oh45,
le peloton moto remontant de Bologne fait sa jonction à Léglise avec le gros de sa compagnie, qui se met en
défensive dans le village. A 15h 15, elle reçoit l'ordre de repli sur Offaing.
A Cobreville:
- la patrouille Simonet
subit un feu violent d'armes automatiques ennemies, et est bloquée. Les
Allemands se replient bientôt de Cobreville,
et constituent deux points d'appui: l'un au nord de Nives, l'autre à Petite-Rosière.
Quant à la patrouille Simonet, elle est
rappelée à 14h30 par le commandant de la 2e Cie, qui a reçu l'ordre de repli
général de tout le I/1er ChA;
- la 10e Cie
moto du 2e ChA (amputée d'un demi-peloton moto et de ses 3 T.15 qui occupent la
vallée de l'Ourthe entre Houffalize et Laroche), après divers ordres et contre-ordres, arrive au nord de PetiteRosière. Les 4 T.13, prélevés sur la position
devant Bastogne, la rejoignent. Il est
environ 13 heures. Tout le détachement est pris sous le feu du point d'appui
allemand du nord de Nives. Un T.13 est
mis en flammes, et ses munitions sautent; le détachement belge est bloqué. Et,
à 15 heures, il reçoit l'ordre de se replier avec les I et II/ler ChA sur le chemin de fer Bastogne-Libramont.
Sur la route Traimont-Witry, la patrouille Schweicher (le T.13, seule arme antichars de la
compagnie de Bodange, et 10 chasseurs mal
armés de l'état-major du IIe bataillon)
se heurte vers 10 heures, aux lisières Est de Traimont, à plus d'une centaine d'Allemands armés jusqu'aux dents
(mortiers, etc.). Schweicher ne peut que
se replier lentement vers Fauvillers. Ayant
reçu un 2e T.13, il repart vers l'Ouest jusqu'à la «Barrière de Fauvillers», et tiendra là jusqu'à 18 heures,
permettant ainsi aux débris du IIe bataillon
de se replier vers le Nord. Ensuite, un des deux T.13 s'échappe vers le Nord,
tandis que l'autre, mis en feu par le tir ennemi, doit être abandonné. Schweicher et ses quelques chasseurs se replient à
pied dans la forêt d'Anlier, mais seront
capturés le lendemain vers 11 heures.
2. - LES CHASSEURS ARDENNAIS DE LA POSITION FRONTIÈRE (BASTOGNE... STRAINCHAMPS... BODANGE... MARTELANGE)
Les Allemands devant
attaquer la position frontière par voie terrestre, arrivent devant celle-ci
plusieurs heures après les atterrissages de l'opération NIWI, puisqu'ils ont dû traverser le Grand-Duché de Luxembourg.
La 4e Cie du
1er ChA, à Martelange, est attaquée à 7h30 par les éléments de tête de la 1ère
Panzer. Elle résiste très bravement, mais se replie par ordre à 10h40, et va s'installer à Fauvillers.
La 5e Cie (moins
le peloton de Strainchamps) est attaquée
par la 1ère Panzer un peu après 11h30 (heure de la prise de Wisembach par l'ennemi). Elle va résister héroïquement
jusqu'aux environs de 18 heures (!), étant depuis 16 heures sous le feu de
l'artillerie allemande.
Le peloton de Strainchamps, attaqué
dès 10 heures par les éléments de tête de la 2e Panzer, résiste si bien que la
lutte dure jusqu'à 17h30 (!).
Signalons aussi,
plus au Nord, l'admirable défense de 2 pelotons de la 3e compagnie du 3e
Chasseurs Ardennais, à Chabrehez, contre
l'avant-garde de la 7e Panzer du bientôt fameux général Rommel. Les Chasseurs
ardennais étaient de toute première valeur, mais la 1ère DChA ne reçut absolument aucune aide de la 1ère DC,
l'autre division du Groupement K, et dut bien entendu obéir aux ordres du
général Keyaerts concernant le repli.
3. - LE REPLI GÉNÉRAL DES CHASSEURS
ARDENNAIS SUR LA POSITION D'ARRIÈRE-GARDE (8) (voir carte)
(8) Résumé de ce qui a paru dans la RBHM. N° XXI-2 de juin 1975, pp.
136 à 138 (+ carte).
A 11h20, le général Descamps, commandant la 1ère DChA, annonce au Groupement K que vu le débordement
par le Sud (à Martelange), et la présence
des aéroportés ennemis à Léglise et Traimont, il envisage le repli du 1er ChA sur le
chemin de fer Bastogne-Libramont, en deux
bonds.
A 12h40, le Groupement K dit à la 1ère DChA que si le 2e ChA devait
abandonner la lisière Est de Bastogne, il
se reporterait à la lisière Ouest, toujours en liaison, au chemin de fer, avec
le 1er ChA.
C'est à 15h20 que le
2e ChA reporte sa défense à l'ouest de Bastogne, mais, vers 18h45, sous la pression ennemie,
il doit retraiter. Au 1er ChA, les
bataillons n'arrivent au chemin de fer de Libramont
que vers 18 heures, le bataillon Sud (IIe)
en très mauvais état car il n'a pas reçu à temps l'ordre de repli (lancé à
13h30). Les chasseurs se sont battus comme des lions, mais sur place
conformément aux ordres initiaux, au lieu de pratiquer une défensive de
retraite pour laquelle ils avaient été instruits (9);
aussi ont-ils été encerclés par les forces ennemies immensément supérieures, et
leurs pertes sont très lourdes.
(9) CDH (Centre de
Documentation Historique des Forces Années belges, ex-Section Historique): Histoire de la 2e DChA par le général Ley, qui commandait la DChA jusqu'à la mobilisation d'août 1939,
puis la 2e DChA
lors du dédoublement de la DChA en une 1ère et une 2e divisions.
A 16h45, le général Descamps avait dit qu'en cas de perte de la position
du chemin de fer Bastogne-Libramont, la
défense serait reportée sur l'Ourthe occidentale
(ligne Nisramont-Libramont), mais à
18h45, le général Keyaerts ordonne le
repli «à la chute du jour», d'emblée sur la Position d'Arrière-Garde, c'est-à-dire l'Ourthe de Petit-Han à Comblain-au-Pont.
4. - LES ALLEMANDS, LE SOIR DU 10 MAI, DANS LE SECTEUR
ASSIGNÉ À LA 5e DLC FRANÇAISE
En allant du Nord vers le Sud du «front», nous avons:
- la 2e Panzer: ses
éléments avancés sont tout juste à l'ouest de Menufontaine;
- la 1ère Panzer: son avant-garde est déployée à
l'ouest de Fauvillers;
- la 10e Panzer: l'IRGD,
en tête, occupe la ligne générale Marbehan
(ex)-Poncelle;
- les aéroportés (gros du III/IRGD):
- le groupe Sud (Garski)
a réalisé sa jonction avec les éléments avancés de la Ire Panzer, vers 16h30,
entre Fauvillers et Bodange
- le groupe Nord
(Obermeier), refoulé par les Français,
est dans un bois au nord de Nives.
Grâce aux Chasseurs
ardennais et aux Français de la 2ème DLC (devant
la 10e Panzer), les Allemands sont donc loin d'avoir atteint leurs objectifs du
jour, c'est-à-dire Libramont pour la 2e
Panzer, Neufchâteau pour la 1ère, et Florenville pour la 10e.
II- LA 5e DLC FRANÇAISE
1. - L'ALERTE
La 2e Armée française a été alertée à 5h20 (10). A l'état-major de la 5ème DLC, on note (ll):
- 5h40: coup de téléphone «Alerte Tilsit
I»; - 6h23: toutes les unités prévenues;
- 7h20: reçu mesure Wagram (= ordre d'entrer en Belgique);
- 7h50: ordre téléphoné: franchir la frontière immédiatement par
DD et DSE,
et à 8h30 par les avant-gardes (des Gros).
(10) SHF (Service historique de
l'Armée française au Château de Vincennes): 2e Armée: 3e bureau (Opérations), cartons 52 et
66. Ornano: La
5e DLC dans les Ardennes, p. 18.
(11) SHF: 5e DLC: carton 78, p. 30.
Notons que, d'après
leurs archives, la Cie de sapeurs-mineurs
n° 34/1 a été alertée dès 4h45, et le 12e GRCA
à 5 heures.
2. - CHEZ LES BELGES
Au Groupement
K on note:
- 6h52: de l'EMGA: les troupes franco-britanniques peuvent pénétrer librement sur notre territoire;
- 7h00: à la 1ère DChA: ouvrir les routes allant vers le Sud;
- 7h 15: à la
Gendarmerie de Bouillon: ouvrez tous les obstacles. Ndlr: Il y a
déjà près de deux heures et demie que l'attaque allemande a été déclenchée
(4h35). Et, hélas, ouvrir les obstacles, c'est plus vite dit que fait. Les 2
escadrons de lanciers qui étaient à la Semois sont partis vers le Nord (le ler à 6h50, le 4e à 7h45); les gendarmes et douaniers,
aidés par des civils, font ce qu'ils peuvent mais, dans bien des cas, ils n'ont
pas achevé le travail et des obstructions causeront des retards aux troupes
françaises.
- 7h50: ordre à la Gendarmerie de Bouillon de prévenir
de l'arrivée des Français.
La Gendarmerie de Bouillon signale:
- 8h05: le
lieutenant français Collin, du 265e RI,
vient de passer avec 20 motocyclistes; il a dit que les motorisés suivent (12);
- 8h20: le 5e RAM
passe à Bouillon et roule vers Paliseul;
- 9h
15: le 12e Chasseurs à cheval passe à Bouillon en direction de Paliseul. Troupes à cheval passent depuis une heure et
demie. Ndlr: Les gendarmes disent que les Français vont vers Paliseul, puisqu'ils empruntent le route du Nord. Mais
au carrefour, à mi-chemin de Paliseul, la
plupart des unités prendront, à droite, la direction de Recogne et Libramont.
(12) II faut sans doute lire «295e RI», dont le 1er bataillon, comme dit
plus haut, est mis aux ordres de la 5e DLC et doit aller prendre position sur la Semois. Selon toute vraisemblance
le lieutenant Collin
appartient à
l'unité de reconnaissance
régimentaire,
et doit progresser un peu au-delà de la Semois, en mission de couverture.
III. - LA PROGRESSION DES DÉTACHEMENTS DE DÉCOUVERTE (DD) ET DES DÉTACHEMENTS DE SÉCURITÉ ELOIGNEE (DSE)
1. - DEVANT LE GROUPEMENT OUEST DE LA
DIVISION
a) Le DD.1 du commandant Rougier sur l'itinéraire principal (Bouillon... Libramont... Houffalize)
Le DD.1 du commandant Rougier
doit progresser vers Libramont en Houffalize. II franchit la frontière au sud de
Bouillon à 8h25, est à la Semois à 8h45,
et à 9h45 en vue de Libramont. A Recogne, une fraction doit emprunter un itinéraire sur
le flanc Nord, par Saint-Hubert, puis
rejoindre le gros au carrefour de Bonnerue-Pironpré.
(1) La
fraction du DD.1 qui passe par Saint-Hubert
Il se fait qu'à Saint-Hubert se trouve le quartier général du
Groupement K. D'après les carnets de campagne de l'état-major du général Keyaerts, c'est à 9 heures 50 que le premier
détachement français est entré dans la ville (13).
Cette fraction du DD.1 qui passe par Saint-Hubert prend ensuite, à droite, la route de Bonnerue, pour aller se ressouder au gros du
détachement au carrefour de Bonnerue-Pironpré.
Le lieutenant Gillet, officier de
matériel du Ier bataillon du ler Chasseurs Ardennais, qui, à l'aube, venant de Morhet, a regroupé son charroi le long de la route Saint-Hubert/Bonnerue, à environ un kilomètre au
nord-ouest du carrefour de Pironpré, écrit:
«9 heures 15: prise de contact avec
un lieutenant français commandant un détachement motorisé (motos et blindés) et
se rendant vers Houffalize.
Ce lieutenant est entré en Belgique vers 7 heures».
(13) CDH: Grt. K: CC/1er bureau: 9h50.
Quelle fut
l'attitude des Belges, militaires et civils, lors du passage des Français à Saint-Hubert? Le lieutenant Haibe, de l'état-major
du Groupement K, a raconté au lieutenant Hautecler
(14): «Nous
entendions jusqu'au PC les cris enthousiastes de la population, qui
parvenaient presque àcouvrir le bruit des
engins français. L'officier de liaison de la 2e Armée entrait bientôt au PC. Je
me rappelle l'émotion que sa présence nous causa, il était pour nous l'image de
nos garants volant a notre secours».
(14) CDH: Grt. K: document n° 10: Souvenirs du
lieutenant Haibe,
recueillis en captivité, le 2/8/40, à I'Oflag IX A/Z (Rotenburg an der Fulda) par le lieutenant Hautecler.
Mais pour ce qui est
de la collaboration militaire avec les Français, c'est autre chose. Le
capitaine de Selliers de Moranville écrit
en effet (15):
«Vers 10 heures arrive un commandant,
officier de liaison de la 2e Armée française. Je lui remets un croquis donnant
la situation de nos troupes, et un croquis de nos destructions. Je lui fais
connaître notre plan d'opérations et de mises à feu. Il est très étonné ..., il
s'élève contre notre plan de destructions qui, à son avis, va empêcher les
troupes française de parvenir à leurs objectifs... Le Groupement K a reçu
l'ordre du GQG d'opérer
en toute indépendance des troupes alliées et sans essayer d'adapter st mission
à celle de ses voisins».
(15) CDH: Grt. K: document n° 16: Rapport du
capitaine de Selliers
de Moranville,
chef du 1er bureau (Opérations), rédigé à Londres le 4/2/1942.
D'après le
lieutenant Hautecler, le lieutenant Haibe a confirmé cet état d'esprit:
«Les Français voulaient qu'on ouvre
les barricades, de façon à passer au-delà du dispositif de défense de la 1ère
Division de Chasseurs Ardennais. Il n'en était pas question, et le général leur
opposa une fin de non-recevoir fermement polie».
(2) Le gros du DD.1 passant par Libramont
A 9h 15, la Ire
compagnie du 2e Chasseurs Ardennais, qui tient l'important noeud routier de Recogne-Libramont
(16), signale
à l'état-major régimentaire que 3 autos-mitrailleuses françaises et plusieurs side-cars
sont au pont de Libramont (17). Ce sont les
premiers véhicules du gros du DD.1. Les
Français seront contraints de marquer là un sérieux temps d'arrêt;
rappelons-nous en effet que dès 2h10 le Groupement K a ordonné la fermeture de
toutes les obstructions non situées sur les itinéraires de repli (d'orientation
générale Sud-est/ Nord-ouest) des Chasseurs ardennais. Or, la route Libramont-Houffalize, allant du Sud-ouest au Nord-est,
n'est pas un itinéraire de repli...
(16) II y avait dans les
Ardennes un système de fortification, construit de 1931 à 1935, c'est-à-dire a
l'époque du ministre de la Défense Nationale Albert Devèze, et comprenant 309
«abris» ou casemates, dont 8 autour du noeud routier appelé étoile de Recogne, pouvant ainsi être défendu tous azimuts.
Mais, à l'autonme
de 1939, lorsque
l'Armée belge mobilisée
dispose la majorité de ses forces «face au Sud», elle fait construire dare-dare
(même de nuit, à la lueur de projecteurs), à Recogne et Libramont, 12 abris énormes à 2 ou 3
embrasures: 8 à l'étoile de Recogne, formant un arc de cercle concentrique à celui de
1934, à l'intérieur
de celui-ci: 4 à Libramont, formant un demi-cercle adossé au chemin de fer, et ne
pouvant tirer que vers le Sud (!) (A. Bikar: Les ouvrages de fortifïcation
belges en 1940: Les abris des Ardenees, in RBHM, n° XXI-4 de décembre 1975, pp. 361 à 415 + photo, et 2
cartes).
(17) 1ère
Cie/2e ChA: 91115:
CC/2e bur.
Crt K: 10h05- «arrivée des Français à Libramont».
Le 2e Chasseurs Ardennais tient la région
de Bastogne avec 6 de ses compagnies (18). Son PC est à Sprimont-lez-Amberloup. A 9h30 ce PC répond à la compagnie de Libramont : «Dirigez
les Français vers Bastogne». Mais la
compagnie rétorque, à 10 heures: «Les Français se dirigent vers Houffalize; c'est un détachement de découverte,
commandant Rougier». Le commandant Rougier doit, d'après ses ordres, aller à Houffalize en passant par Amberloup et Bertogne,
et non par Bastogne. Au carrefour de Bonnerue-Pironpré, la fraction venue par Saint-Hubert rallie le gros du DD.1, et le commandant Rougier continue à progresser vers Amberloup;
peu après, il arrive au hameau de Sprimont.
Là, du PC du 2e Chasseurs Ardennais, le message suivant est téléphoné à Saint-Hubert, au QG
du Groupement K:
«Une colonne française de 2 pelotons
moto et 2 pelotons de chars (Ndlr: il s'agit évidemment de AMD Panhard, et non de chars) vient de prendre contact avec
le PC. Le commandant de colonne a pour mission de se rendre à Houffalize. Impossible qu'il dépasse Mabompré, vu destructions. Cette
colonne peut-elle déboucher de Bastogne? Allemands signalés à Bourcy et Hardigny. Le commandant de la colonne française se porte
provisoirement à Bastogne».
(18) Le 3e ChA
(PC à Sprimont)
tient le front Villereux-Bastogne-SaIvacourt avec 2 bataillons (Ile au Sud: 4e. 5e et 6e Cie: IIIe au Nord: 7e,
8e et 9e Cie).
Le Ier bataillon est sur la Position d'Arrière-Garde de l'Ourthe avec ses 2e et 3e Cie. La 1ère Cie est à Libramont, et tactiquement
elle dépend directement de l'état-myor du Groupement K.
D'après le carnet de campagne du ler bureau de l'état-major du Groupement K, il est à
ce moment-là 10h40. Que répond le
Groupement au message du 2e ChA?: «Ne pas
ouvrir les barricades».
En somme, il est
signifié aux Français que, sur la route de Houffalize,
ils ne pourront pas dépasser Mabompré, et
que s'ils préfèrent courir sus à l'ennemi par Bastogne, on ne leur ouvrira pas les barricades par lesquelles ils
pourraient déboucher de la ville, vers l'Est. C'est d'autant plus navrant qu'à
ce moment-là les Allemands sont encore loin de Houffalize et même de Bastogne: à
Bourcy et Hardigny il n'y a que quelques éclaireurs ennemis. Bourcy (8 Km NE de Bastogne)
est sur l'itinéraire Nord, et Hardigny (10
Km N-NE de Bastogne) sur l'itinéraire Sud de la 3e Infanterie Division (ID)
allemande. L'avant-garde du groupement Nord de cette ID se compose de
l'escadron cycliste divisionnaire, renforcé par un peloton antichars (3 canons
de 37) et une escouade de pionniers du 8e Infanterie Regiment (IR). D'après les
documents allemands, elle a atteint la frontière belge peu après 9 heures, et ce
n'est que vers 14 heures qu'elle entrera en contact avec la position belge, au
nord de Vaux (3 Km à l'ouest de Hardigny).
L'avant-garde du groupement Sud de cette 3e ID comprend la 9e Cie et un peloton
de la 14e Cie antichars du 29e IR, ainsi que des pionniers. D'après les
documents allemands, après avoir dépassé Bourcy,
elle entre en contact avec la position belge vers 16 heures seulement (19).
(19) CDH: photocopies de
documents allemands: archives des 3e et 32e divisions.
Ces deux
avant-gardes allemandes étaient évidemment précédées par des éclaireurs. Le
commandant de la 9e compagnie du 2e Chasseurs Ardennais signale leur arrivée à
la barricade de Mabompré à 12h25. Pris à
partie par les fusils-mitrailleurs des Chasseurs ardennais, ils n'insistent pas
et se dissimulent dans les bois.
Et à Houffalize? La 32e ID allemande, qui marche au nord de
la 3e, a pour objectif le tronçon Houffalize-Dinez
de la grand'route Liège-Arlon. Sur
l'itinéraire Nord, le groupe de reconnaissance divisionnaire n'atteint la ligne
Brisy-Cetturu (4 Km à l'est de Houffalize) qu'à 13h45. Le 96e IR, qui marche sur
l'itinéraire Sud de la division, est arrêté devant une obstruction sur la route
de Tavigny, 800 mètres à l'est de Houffalize, à 17h45. C'est dire à quel point le DD.1 du commandant Rougier
aurait pu atteindre Houffalize bien
longtemps avant les Allemands... s'il n'y avait pas eu les obstructions belges:
la barricade de Mabompré et les abattis
réalisés à partir de 2h25 sur la route de Mabompré
à Houffalize.
Houffalize, au fond
d'une cuvette, est difficilement défendable. Mais on peut facilement faire du
combat retardateur d'abord sur les crêtes à l'Est, puis sur celles à l'Ouest,
et interdire ainsi à l'ennemi de déboucher de la ville et de prendre les routes
de Laroche et de Mabompré-Amberloup.
Revenons maintenant
à l'état-major du Groupement K, pour voir ce qu'on y pense du DD.1 du commandant Rougier.
A 10h45, la mention suivante est inscrite
dans le carnet de campagne du 1er bureau (celui des Opérations): «Ce
détachement (DD.1) se porte à Houffalize par Compogne,
Bonnerue, Wibrin, Mont, Fontenaille» (20). Pourquoi
ce détour par Fontenaille, qui est à 4 Km
au nord de Houffalize? De là, la petite
ville ne sera pas plus accessible que par Mabompré,
puisque les destructions ont été opérées sur tout son pourtour (voir carte).
Mais Fontenaille est justement à la
lisière Sud du terrain tenu par la 10e compagnie (la compagnie motocycliste) du
3e Chasseurs Ardennais, dont les 3 pelotons sont respectivement à Montleban, Sommerain et Taverneux. Le 3e Chasseurs Ardennais tient la position de la Salm, et
devra se replier après les 1er et 2e régiments, qu'il doit couvrir pendant leur
remontée vers le Nord, jusqu'à la position de l'Ourthe. Or, la 10e compagnie du régiment acte à son carnet de campagne
que les Allemands sont devant Sommerain à
1Oh25, et sur la route de Houffalize à Taverneux
à 10h40. A 11h05, le commandant de l'unité envoie une estafette au
colonel, pour annoncer que ses pelotons de Sommerain
et de Taverneux sont au contact de l'ennemi.
Il ne s'agit que de quelques éclaireurs du groupe de reconnaissance de la 32e
ID, dont nous avons déjà dit un mot. Mais le voisin du Nord de cette ID n'est
autre que le général Rommel avec sa 7e Panzer Division, dont peu après le
bataillon motocycliste bouscule le peloton de Montleban, puis obliquant vers le Nord-est, attaque Chabrehez. L'héroïque combat livré dans ce petit
hameau par la 3e compagnie du 3e Chasseurs Ardennais a été fort bien décrit par
le commandant Hautecler (21).
(20) II y a 2 «Bonnerue»: le petit village
situé entre Bertogne
et Houffalize
(c'est de lui qu'il est question ici), et un petit hameau près du croisement des routes Libramont-Houffalize et
Saint-Hubert-Morhet. Ce carrefour est dit de Pironpré ou de Bonnerue. II en est question à propos du
repli du I/1er ChA; c'est la 10e Cie/2e ChA qui le fait sauter, le 10 mai à 23h30.
(21) Hautecler (commandant): Chabrehez (brochure publiée par l'Etat-major général de l'Armée en 1955).
La présence des
Allemands à Montleban, Sommerain et Taverneux a tout de suite inquiété le colonel du 3e
Chasseurs Ardennais, qui sait que Houffalize
n'est pas défendu, et qu'il y a une trouée de 11 kilomètres, - où le terrain,
il est vrai, est peu praticable -, entre sa 10e compagnie et la compagnie Nord
(la 9e) du 2e Chasseurs Ardennais, à l'ouest de Mabompré. C'est probablement parce qu'il partage cette inquiétude -
même s'il n'a pas encore reçu la nouvelle de l'arrivée là-bas des Allemands -, que le général Keyaerts, à 10h45,
a orienté le DD.1 de la 5e DLC vers cet endroit, en donnant l'itinéraire que l'on
sait. A 11 heures, le capitaine de Selliers, chef du lerbureau de l'état-major
du Groupement K, téléphone au 3e Chasseurs Ardennais pour dire:
«Une reconnaissance française va être
portée à Houffalize via Nadrin et Wibrin. Prévenir la 10e compagnie».
Le capitaine Wauthoz, adjudant-major du 3e Chasseurs Ardennais,
note dans son cahier:
«11 heures: le commandant du
Groupement K nous avertit qu'une reconnaissance française motorisée va être
portée à Houffufize via Nadrin et Wibrin. Joie énorme au PC
régimentaire au reçu de cette communication: le sud de notre position sera
solidement appuyé».
Disons tout de suite
qu'à la fin de l'après-midi du 10 mai, il y aura réellement des Français à Wibrin, mais ce sera un DD de la 1ère DLC, de la 9e Armée
(22) car le DD.1
de la 5e DLC (de la 2e Armée), dont il
est question à 10h45 et à 11 heures au
Groupement K et au 3e Chasseurs Ardennais ne franchira pas l'Ourthe au nord de Bonnerue: des destructions vont l'arrêter.
(22) A. Bikar: La 1ère DLC française à l'est de
la Meuse,
les 10, 11 et 12 mai 1940, in RBHM, n° XXVI-2 de Juin 1985, pp. 137 à 159, et XXV I-3 de septembre 1985,
pp. 175 à 210; voir spécialement les pp. 140, 141, 175 et 176, concernant le DD du
capitaine Garnier.
Dans quelle mesure
en effet, l'itinéraire Compogne,
Bonnerue, Wibrin, Mont, Fontenaille sera-t-il
encore praticable, lorsque le commandant Rougier
arrivera à Compogne? Les destructions du
groupe Bertogne ont sauté dès 5h17. Le
petit détachement du lieutenant Deflines (3
chars légers T.15 et un groupe moto de la 10e compagnie du 2e Chasseurs
Ardennais), qui est dans la vallée de l'Ourthe
orientale (Houffalize-Nisramont) pour
assurer la liaison entre le 2e et le 3e Chasseurs Ardennais, recueille dès 5 heures
les équipes de destruction de Houffalize.
Le lieutenant se trouve à ce moment-là au pont de Rentimez, et une partie de son détachement est plus à
l'Est, au pont de Suhet. Ce pont est
obstrué vers 11 heures. Il serait dès lors impossible aux véhicules du DD.1, venant de Compogne
et Bonnerue, de traverser l'Ourthe pour aller à Wibrin. Le pont de Rentimez sautera
vers 15h30.
Pendant ce temps,
qu'advient-il du DD.1? A 13 heures, le colonel Merckx, commandant le 2e Chasseurs Ardennais,
téléphone au Groupement K: «Les Français sont arrivés à Compogne: 2 pelotons moto et 2 pelotons d'autos
blindées. Attaque en préparation». Réponse du Groupement K: «Mettez-vous en
rapport avec l'officier français commandant ce détachement. Général d'accord».
Pourquoi le général n'aurait-il pas été d'accord? Le major Danloy, commandant le IIIe bataillon du 2e Chasseurs Ardennais (PC à Bertogne), écrit dans sa relation des événements:
«Vers 13 heures, arrivée à Bertogne d'un détachement de blindés
français, commandé par un commandant d'escadron. Je le mets au courant de la
situation, lui signalant entre autres que ma gauche n'est pas garnie. Il
m'écoute à peine, dit qu'il doit aller à Houffalize, bien que je lui déclare la chose impossible à cause des
destructions réalisées. J'insiste sur la trouée non gardée qui est au nord de
la position, et le commandant des blindés français décide d'envoyer deux
blindés en reconnaissance à l'est de Bonnerue
et d'installer le gros de ses forces, - une douzaine de blindées et des motos,
- à Compogne. II place
également deux blindées à hauteur de la position de la 9e compagnie, sur la
route de Mabompré. Elles
interviendront vers 17 heures sur
l'ennemi qui progresse par la route de Houffalize,
et sur des vélos déposés par l'ennemi le long de la dite route».
Le commandant Maton, commandant la 9e compagnie, signale dans son
compte rendu que le détachement français du 5e RAM, comprenant 8 autos blindées
et des motos, arrive à Compogne:
«Première prise de contact avec nos
alliés. J'oriente le commandant du détachement sur la situation et le
dispositif (le la compagnie. L'officier français voudrait gagner Houffalize. Impossible: obstructions,
champ de mines et des destructions sautées. De plus, l'ennemi est à Mabompré. Une auto blindée
intervient. L'ennemi ne riposte pas. Je demande au chef du détachement d'autos
blindées de patrouiller sur mon flanc gauche découvert, Jusqu'au gué d'Achouffe où se trouve un de nos
chars T. I S en surveillance. J'obtiens satisfaction».
Hélas, les choses ne
vont pas tarder à se gâter entre Belges et Français.
Peu après 18 heures,
le commandant du IIIe bataillon du 2e
Chasseurs Ardennais reçoit l'ordre de repli, et le transmet à ses compagnies
(la 9e le reçoit à 18h27). D'abord les compagnies Sud et Centre (7e et 8e),
puis la 9e pour laquelle l'heure H est 18h45 et dont le peloton Centre, sur la
route de Mabompré, doit décrocher en
dernier lieu. Itinéraire prescrit: Bertogne,
Ortho, Laroche, Hotton, Tohogne. Sans
combat retardateur, et sans arrêt (23). Cet
itinéraire est orienté vers le Nord/Nord-ouest,
c'est-à-dire qu'il est perpendiculaire à la direction générale Nord-est/Sud-ouest qui est celle des Allemands comme
des Français.
(23) Morsomme: Face au Devoir (Historique du Bataillon moto de Chasseurs ardennais, qui le
10 mai était à Laroche), p. 47: «19h06: le colonel Merckx (Comd le 2e ChA) demande par téléphone de prévenir le
major Danloy (Comd le Ille Bon) qu'au lieu de s'arrêter à hauteur
de l'Ourthe à Ortho, il doit
se replier sans désemparer». Le sergent
Morsomme part à moto pour remettre le message au major Danloy, qu'il trouve sur la place d'Ortho). CDH/JC/1ère DChA: « 19h05: au 2e ChA: il n'y aura pas d'arrêt sur l'Ourthe occidentale».
Le major Danloy, dont les compagnies doivent se rassembler à Bertogne, aimerait que le décrochage soit protégé par
les Français:
«Je compte que les autos blindées
françaises vont m'aider, et je vais au PC du commandant Maton, à Compogne, pour voir le commandant
français. Je lui expose la situation. Il répond oui d'un air absent. J'insiste.
Il dit oui mais me demande mon itinéraire de repli, que je lui répète (je lui
avais montré auparavant par où les routes ne seraient pas obstruées)».
Pourquoi cette
attitude du commandant Rougier? Le
commandant Maton nous le dit:
«Vers 19h15 j'avais fait demander
l'appui des autos blindées du détachement français afin de faciliter le
décrochage de mes pelotons. Deux blindées interviennent par quelques rafales,
puis se replient nous abandonnant à notre sort. La principale préoccupation du
chef du détachement était de voir maintenir la voie libre vers Libramont, pour son repli. II entre
plusieurs fois en contact par téléphone à ce sujet avec le commandant de
bataillon et même le commandant du régiment».
Le major Danloy, revenu à Bertogne,
à son PC, regarde dans la direction d'où doit venir sa 9e compagnie; il écrit:
«Voici un peloton de la 9e, puis un
deuxième, puis une section de Mi, puis le commandant Matou qui gesticule près
de l'obstruction (sur la crête, entre Compogne et Bertogne). II me dit que son peloton Centre, sur la route de Mabompré et au Sud, est accroché
depuis que les Français ont abandonné le terrain, avant même que la compagnie
démarre».
Il faut tout de même
ajouter que ce bataillon, à l'aube, avait en appui 8 chasseurs de chars T.13
(de la 11e Cie régimentaire antichars). Deux pièces lui furent prélevées dans
la matinée. Au moment du repli il en avait donc encore 6, et ces engins
chenillés étaient tout spécialement prévus pour couvrir les décrochages, et
faire l'arrière-garde des colonnes. Les 6 pièces en cause arriveront sans
problème à la «Position d'Arrière-Garde»
(Ourthe de Petit-Han à Comblain). Essayons maintenant d'imaginer l'état
d'esprit du commandant Rougier, chef du DD.1. II a pour mission d'aller au plus vite et aussi
loin que possible chercher le contact avec les Allemands, à Houffalize ou au-delà, afin de ralentir leur avance,
tout en cherchant à obtenir des renseignements sur la force, la nature et la
direction de leurs colonnes. Or, depuis qu'il a franchi la frontière belge, il
a constamment été ralenti ou contrarié dans ses mouvements par des palabres et
par les destructions belges. Pendant ce temps-là l'ennemi avance. Arrivé à Bertogne, Rougier se rend compte non seulement qu'il
est bloqué vers l'avant et sur les côtés, mais aussi vers l'arrière, et que les
Belges continuent leurs destructions sans se soucier de lui, ne laissant
praticable que leur propre itinéraire de repli en direction du Nord-ouest, un
peu comme s'ils s'écartaient pour laisser passer les Allemands qui, eux, et
tout le monde le sait, progressent vers l'Ouest ou le Sud-ouest. Et ces Belges
qui se replient sur ordre et non sous la pression ennemie, invitent Rougier à protéger leur décrochage alors qu'ils ont
des engins chenillés tous terrains, aptes à cette opération (les canons de 47
des T.13 tirent un obus antichars mais aussi un obus explosif antipersonnel;
les T.13 ont en outre un FM). Or, Rougier
n'a que des autos mitrailleuses de découverte,
à roues, faites pour les grands raids, les reconnaissances à longue distance
et le harcèlement de l'ennemi, et non pour appuyer des fantassins, même cyclistes.
Les Belges accusent Rougier de partir un peu tôt. Non seulement il n'est
pas trop tôt, mais il est trop tard! Car la seule direction de repli
concevable, pour Rougier, c'est
évidemment non latéralement mais vers l'arrière, à reculons, face à l'ennemi,
et en le ralentissant. Or cet itinéraire vers l'arrière, les Belges ont
commencé à l'obstruer, et continuent à le faire. A 15h53, on inscrivait déjà,
dans le carnet de campagne de l'état-major du 2e Chasseurs Ardennais:
«Les barricades ne peuvent être
ouvertes pour le détachement français. Ce détachement se repliera par Bertogne, Ortho, Tenneville, barrière
Hinck, route de Libramont».
Quand le DD.1 quitte Bertogne,
en dépit du désir de rester sur son axe Houffalize-Libramont,
il est en effet obligé de prendre la route d'Ortho.
Arrivé dans cette localité, il prend vers le Sud-ouest pour rallier la route Houffalize-Libramont par Ortheuville, puis la route Champlon-Bastogne jusqu'à la barrière Hinek. Là, revenu sur son axe, il se postera, puis en
cas de nécessité se repliera vers Amberloup
et Libramont. Hélas! le DD.1 n'est pas au bout de ses avatars: arrivé à la
barrière Hinck, il devra faire demi-tour,
c'est-à-dire reprendre la route de Champlon...
jusqu'à Marche!
Que s'est-il passé?
La route Bastogne-barrière Hinek-barrière
de Champlon est justement le chemin de
retraite du IIe bataillon du 2e Chasseurs
Ardennais, et, au moment où le DD.1 roule
d'Ortheuville vers la barrière Hinck, le bataillon belge arrive en sens inverse, son
arrière-garde procédant aux obstructions et destructions au fur et à mesure de
son repli. Le major Delvaux, en tête de
son bataillon, évoque comme suit l'incident (24):
«Au moment où je descends vers le
pont d'Ortheuville, je
rencontre le capitaine Geerts,
qui me dit qu' une
colonne motorisée française vient de franchir le pont se dirigeant vers Bastoane (25). Je n'ai pas vu le commandant de
colonne. Avant que j'aie eu le temps de faire demi-tour à Ortheuville et de rebrousser chemin
pour aller lui expliquer la situation, ce commandant de colonne sera arrivé à
la barrière Hinck, où il
sera arrêté par la 5e compagnie qui fait l'arrière-garde. Les routes allantde cctcndroit vers Houffalize, Bastogne et Librarnont sont couvertes
d'obstructions. Après une heure de discussion, les motorisés français font
demi-tour».
(24) CDH: archives du 2e ChA:
Ile Bon, documents 2b (cahier du major Delvaux) et 3a (manuscrit du major Delvaux).
(25) Ni le
major Delvaux
ni le capitaine Geerts ne peuvent savoir que le commandant Rougier n'a pas
l'intention d'aller jusqu'à Bastogne, mais bien de s'arrêter à la barrière Hinck, pour retraiter plus
tard par la route d'Amberloup et de Libramont.
Et voilà le
commandant Rougier et sa colonne en route
vers Ortheuville et la barrière de Champlon, qui est dans le secteur de la 1ère DLC, et où se trouve posté le DD Sud de cette division, commandé par le lieutenant
de Vibraye (26). On ne sait ce que Rougier
et de Vibraye se sont dit. Mais ils
n'ignoraient évidemment pas qu'à ce moment-là le DD Nord de la 1ère DLC était à Bérisménil, soutenu par un détachement à Laroche, et
que le Détachement de Sûreté éloignée (DSE)
de la 5e DLC était établi sur la ligne Laval-Morhet. La barrière de Champlon étant un noeud
routier important, et déjà en retrait par rapport à l'alignement Laroche-Laval, il ne pouvait être question de
l'abandonner.
(26) CDH: archives 7e Esc/3e ChCh: rapport du Cdt Delattre: «Dans le
courant de la journée, passages d'estafettes françaises, puis dans l'après-midi d'un peloton
français qui stationne à la barrière, et se retire dans la soirée»; archives 11e
Cie (antichars)
du 2e ChA: relation
du Cdt
Schreer: «10 mai à 19h, retour à la barrière de Champlon, ou je rencontre le SLt Marth, qui commandait les T.13 au point d'appui
de Bastogne. Des motorisés français ont pris position à la barrière»; voir
renvoi (22): pp. 142 et 143: lieutenant de Vibraye et les Belges à la barrière de Champlon.
Mais il y a le plan
belge des destructions! A la barrière de Champlon
se trouve le commandant Delattre, commandant
le 7e escadron (blindé) du 2e Chasseurs à cheval belge, avec un de ses pelotons
(2 chars légers T.15 et 2 T.13), dont la mission est d'attendre le IIe bataillon du 2e Chasseurs Ardennais, puis de
protéger l'équipe du Génie chargée de faire sauter tout: carrefour et routes
qui y arrivent, et notamment celles de Nassogne
et de Saint-Hubert, qui constituent les
chemins de repli normaux des Français. Le major Delvaux et son bataillon arrivent bientôt. Le major écrit:
«Deux groupes motorisés français
m'attendent à la barrière de Champion. Voyant que je suis décidé à remplir la
mission dontje suis
chargé, les deux commandants de groupe retournent vers Marche. Les destructions,
sur les routes de Saint-Hubert
et de Champlon sont
exécutées. Après avoir fermé Ia barricade à hauteur de la gendarmerie, la troupe continue son repli.
Il reste une destruction dans le bois de Champlon. Après sautage, la 5e compagnie, protégée par les éléments du 2e
Chasseurs à cheval, se replie vers la position de l'Ourthe».
Et voilà les deux
détachements français en route vers le Nord, - seule direction encore
praticable -, bien malgré eux. Le DD de Vibraye s'arrêtera à Chavannes. Le DD Rougier parcourt
lés 7 kilomètres qui le séparent encore de Marche pour aller s'y procurer de
l'essence, puis, par Rochefort, roule en
direction de Libramont pour aller
reprendre sa place dans le dispositif de sa division (27).
(27) - Richecourt: La
Guerre
de Cent
Heures, p. 39: «Elle (la Découverte Ouest de la 5e DLC) va jusqu'à Achouffe où
se trouvent des Chasseurs ardennais qui en se repliant dans la soirée,
n'hésitent pas à faire jouer les destructions derrière elle. Elle est obligée, pour
se replier dans la nuit, de faire un grand détour par Marche, où elle fera de
l'essence».
- Omano: La 5e DLC dans les Ardennes belges, p. 19: «..., destructions du
plan belge, si bien que le DD. 1 se trouve en fin de journée absolument coupé du reste
de la division.»
- SHF: archives
5e DLC: carton
78, p.30: compte rendu: «Le détachement de couverture de gauche, qui est arrivé rapidement dans la
région d'Houffalize,
sera fortement gêné pour son repli par les destructions belges opérées bien que
connaissant la présence des éléments français devant eux».
b) Un «DD-DSE» sur- l'itinéraire secondaire (Paliseul... Libin... Saint-Hubert)
Sur l'itinéraire
secondaire du Groupement Ouest de la 5ème DLC,
où marche le 64e GRDI, il n'y a pas un DD et un DSE distincts,
mais un «DD-DSE», c'est-à-dire un
détachement unique, remplissant à la fois les missions de découverte et
de sécurité éloignée. Ce DD-DSE, sous
les ordres du lieutenant Josset (du 3e Esc/12e GRCA), comprend: 1 peloton d'AMR du 5e Esc/15e
RDP, 2 pelotons moto du 3e Esc/12e GRCA et
1 groupe de 2 canons de 25 (lieutenant Martin) du 5e EDAC. Il semble bien que ce DD-DSE ait progressé sans problème jusqu'à la région
située entre Poix-Saint-Hubert et «Les
Baraques». Le lieutenant Martin écrit en effet:
«Mes canons sont poussés dans la
journée du 10 mai: un au Nord, sur la voie ferrée à voie unique (Ndlr:c'est la ligne vicinale de Paliseul à Saint-Hubert, passant au nord de Libin), un sur la grand'route en direction de Givet (Ndlr: c'est la route de Libin-Wellin-Beauraing-Givet). Après
franchissement des destructions belges, mes canons se sont repliés pour la nuit
sur le village» (Ndlr:
Libin-Bas) (28).
(28) Les
destructions belges en question sont celles des groupes «Mirwart-Grupont» (3 ponts sur la Lomme) et «Saint-Hubert» (8
destructions routières autour de Saint-Hubert, et le pont sur la Lomme, 1 Km à l'ouest de Val-de-Poix).
Remarquons que l'unité voisine de gauche
du DD-DSE en question était la 3e Brigade
de Spahis (3e BS: 2e régiment de Spahis
Marocains «2e RSM», et 2e de Spahis
Algériens «2e RSA»), grande unité de
droite de la 1ère DLC. Le soir du 10 mai,
la 3e BS sera établie comme suit (29):
- PC de brigade aux
Baraques;
- 2e RSA: PC et 2e Esc
aux Baraques; IIe groupe (-3e Esc) au bois de Transinne;
moitié du 5e: sud de Mirwart; 1er groupe
(-2e Esc, + 3e et moitié du 5e): Daverdisse;
- 2e RSM: PC à Libin-Haut; II + moitié du 5e:
Poix-St-Hubert; 3e au passage à niveau du chemin de fer; 4e à droite du 3e; I +
moitié du 5e: Maissin.
(29) A. Bikar: La 3e Brigade de Spahis dans nos
Ardennes, les 10, 11 et 12 mai 1940. in Revue Belge d'Histoire militaire. N° de mars 1986, pp. 387 à 401.
Le 64e GRDI, dont
le PC sera à Libin-Bas, signalera que,
sur la transversale 0.2 (le chemin de fer Namur-Arlon),
il a pris la liaison vers 18 heures: à l'Est avec le 12e Chasseurs à cheval;
«avec le DD-DSE du Lt Josset, qui opère plus au Nord».
c) Le DSE sur l'itinéraire principal (Bouillon... Libramont...)
Le DSE du Groupement Ouest de la 5e DLC est constitué par le 5e escadron «mixte d'AMR et motos» du 15e RDP, commandé par le capitaine Ribes.
A 13 heures, ce DSE arrive à hauteur de la forêt de Luchy, et dépasse l'avant-garde du 12e Chasseurs à
cheval.
A 14h55, le DSE occupe son objectif, c'est-à-dire la transversale
0.2: le chemin de fer Namur-Arlon à Libramont. A Recogne,
le détachement a pris contact avec la Ire compagnie de 2e Chasseurs Ardennais,
et notamment sa fraction chargée des destructions du groupe «LR» (Libramont-Recogne). Il faut croire que la demi-section motocycliste de la compagnie de Sapeurs-mineurs n° 34/l, affectée au DSE, avait pris les devants, car dès midi et demi la
1ère DChA a téléphoné au Groupement K
pour signaler l'arrivée de ce détachement du génie français:
«L'officier de garde de LR (Libramont) signale que le génie français est
arrivé à Libramont. Il a pour mission de
miner le pont de Neuvitlers. Il doit reconnaître le sautage des ponts
de Libramont et de Recogne, et coiffer ces deux ponts par un détachement
moto».
A 17h 12, la 1ère DChA téléphone au Groupement K:
«Délégation est donnée aux Français pour
la mise en feu de LR 1, 5 et 8» (Ndlr: il s'agit du pont de Libramont, du carrefour de Rccogne, et de la route de Fays-les-Veneurs
à Recogne, à hauteur de la borne 27,750).
En vertu d'un ordre
reçu à 15h15, le DSE a progressé pour
aller soutenir le DD. Le soir, ce DSE, qui n'a pu pu prendre contact avec le DD - et pour
cause (voir plus haut) -, s'est établi sur la ligne de surveillance qui lui a
été prescrite; elle passe par Amberloup, Laval
et Morhet. Il n'y a pas de contact avec
l'ennemi.
2. - DEVANT LE GROUPEMENT EST DE LA 5ème DLC
a) Devant le Sous-CroupementNord, sur l'Axe Neufchâteau-Bastogne
(1) Le DD.2 (Toussaint)
Le DD.2, détachement de découverte du Groupement Est de
la 5e DLC, doit progresser sur l'axe Neufchâteau-Bastogne. Il comprend un peloton de 4 AMD et un peloton motocycliste du 5e RAM. Son chef, le
capitaine de Canchy étant en permission
(il rejoindra dans la nuit du 10 au 11 mai), c'est le lieutenant Toussaint,
chef du peloton moto, qui en prend provisoirement le commandement. Toussaint
part à 8 heures. Il doit aller «au moins jusqu'à Bastogne», écrit-il.
A Neufchâteau, Toussaint lui-même ou l'un de ses
adjoints est entré en rapport avec le PC du 1er Chasseurs Ardennais. Le
commandant Krack, adjudant-major du
régiment, évoque en effet l'entrevue qu'il eut avec un officier français (30):
«J'ai contacté personnellement le
lieutenant chef du premier détachement arrivé à Neufchâteau vers 8 heures 30 ... II m'a déclaré devoir
se rendre à la borne ... (j'ai oublié le numéro) de la route Neufchâteau-Martelange; cette borne
se situe vers Witry. Ce
détachement comportait approximativement un peloton motocycliste».
(30) CDH: archives 1er ChA: rapport du Cdt Krack.
Il s'agissait donc
d'une fraction du DD.2, ayant une mission
de flanc-garde au sud de l'itinéraire principal Neufchâteau-Bastogne.
D'autres documents
belges font mention du passage des Français à Neufchâteau. Mais comme les autorités militaires belges ne connaissent
pas l'articulation générale de la DLC
(DD, DSE, etc), les annotations trouvées dans les carnets de campagne ne
mentionnent généralement pas de quel type de détachement français il s'agit.
Quant aux heures notées par les officiers belges, ce sont souvent celles où, -
parfois avec un sérieux retard -, ils apprennent les nouvelles et non les
heures réelles de passage des Français. De là certaines discordances entre les
divers documents d'archives.
Neufchâteau était le
siège d'un commandement de district de Gendarmerie dont le chef était le
lieutenant Gillet, qui écrit (31):
«Vers 9 heures est arrivée à Neufchâteau une première voiture
blindée française avec quelques motocyclistes. Ces derniers ont poussé deux ou
trois patrouilles sur la route de Bastogne; la dernière n'est pas revenue. J'avais à ce
moment, à la clinique de Longlier,
un capitaine aviateur français, le capitaine Laux. II était tombé à Lescheret
dans le courant de février, et comme il était gravement brûlé, je l'avais gardé
à la clinique comme intransportable. II m'avait toujours demandé queje ne le laisse pas tomber dans les
mains des Allemands. Aussi le 10 mai ai-je demandé aux médecins de le faire
transporter par ambulance en France. Comme il avait de la fièvre, ils s'y sont
opposés. J'ai alors donné un sauf-conduit au docteur Miest, chirurgien qui le soignait.
Lequel l'a reconduit en France dans sa voiture personnelle».
(31) Lettre du
17/7/74 du Cdt
de gendarmerie e.r. Giillet, à l'auteur.
Conformément aux
ordres, le lieutenant Gillet a quitté Neufchâteau le 10 mai vers 18 heures, pour se rendre à
Liège, tandis que le personnel du district de gendarmerie locale se repliait
sur Philippeville.
Mais revenons au DD.2. Il est «retardé par des abattis» (32), puis «entre en contact avec l'ennemi à 10
heures à Petite-Rosière» (33). Il y a là
en effet une fraction du détachement aéroporté allemand (le IIIe bataillon de l'Infanterie Regiment
Grossdeutschland, ou «IRGD») de
l'opération NIWI, bien pourvu en armes
automatiques et en fusils antichars (34). Le
terrain ne permettant pas le débordement, Toussaint reçoit l'ordre de rester
sur place et de garder le contact.
(32) Richecourt: La Guerre
de Cent Heures, p. 39.
(33) SHF: 5e RAM: rapport du Lt Toussaint.
(34) A. Bikar: 10 mai 1940: Hedderich et NIWI: les deux
opérations aéroportées allemandes sur petits avions Fieseler Storch, in RBHM, n° de décembre 1974,
p. 722 + carte.
(2) Le DSE
(Fontant)
Le DSE est constitué par le 1er escadron mixte d'AMR et motos du 15e RDP, comprenant 2 pelotons de 3 AMR
et 2 pelotons motocyclistes, chacun d'une quinzaine de side-cars montés par 2
dragons. Au moyen de ces 4 pelotons, on constitue 2 groupements mixtes d'AMR et motos: l'un est commandé par le lieutenant
Glasberg, avec le sous-lieutenant Isaac;
l'autre est sous les ordres directs du capitaine Fontant, commandant de l'escadron, avec le lieutenant Combet. En un premier temps, le détachement Glasberg
doit aller tenir la voie ferrée Namur-Arlon
à Semel (3 Km au nord de Neufchâteau), tandis que le détachement Fontant ira à Longlier.
Le lieutenant Glasberg écrit:
«Je
pars à 7h30; les barricades
à la frontière ont été enlevées. Nous passons à toute vitesse à Muno, puis franchissons la Semois. Je rencontre le DD qui, arrêté par une barricade, a
été retardé. A 9 heures mon détachement est à Semel».
Glasberg cherche à établir la liaison:
- au Nord, à Verlaine, avec le sous-lieutenant de Villelume (du 5e Esc
du 15e RDP), commandant une fraction du DSE du Groupement Ouest de la 5e DLC;
- au Sud, à Longlier, avec le lieutenant Combet du détachement Fontant.
Mais le brave
Glasberg a roulé plus vite que ses voisins: ses agents de liaison reviennent,
disant qu'à gauche comme à droite, personne n'est encore arrivé au chemin de
fer. Soucieux de tenir celui-ci sur toute la largeur du sous-secteur du Groupement, le lieutenant scinde son
détachement en deux fractions: l'une, avec lui-même, se porte à Longlier, tandis que l'autre, avec Isaac, reste à Semel.
A 11 heures, le
détachement Fontant arrive à Longlier, et Glasberg retourne à Semel.
A midi, le capitaine
Fontant et son détachement reprenant leur
progression vers Bastogne, Glasberg
reçoit l'ordre d'étendre sa droite jusqu'à Longlier
inclus.
(3) Le DD.2
(Toussaint) et le DSE (Fontant) font leur
jonction à Petite-Rosière
A 15 heures 15, le
capitaine Fontant, avec sa fraction du DSE, arrive à Petite-Rosière,
et fait sa jonction avec le DD.2 du
lieutenant Toussaint. Fontant prend le
commandement de l'ensemble. Comme entre-temps les avant-gardes des Gros sont
arrivées au chemin de fer Libramont-Neufchâteau,
le détachement Glasberg est devenu disponible et Fontant l'appelle à lui, vers 17 heures. Glasberg et sa fraction du DSE arrivent à Petite-Rosière
vers 18 heures.
Le capitaine Fontant a reçu des ordres pour passer à l'action. A 17
heures en effet, à son PC de Petitvoir, le
colonel Labouche, commandant du 11e
Cuirassiers et, pour la circonstance, commandant du Sous Groupement Nord (Ier groupe/11e Cuirassiers et Ier
bataillon/15e RDP), a reçu du colonel Evain
(et la 15e BLM et, pour la circonstance,
le Groupement Est de la 5e DLC), l'ordre
de prendre sous son commandement le DD.2 et
le DSE, et de faire exécuter deux
reconnaissances: l'une vers Morhet, l'autre
vers Remichampagne. Pour cela, Fontant doit évidemment tout d'abord bousculer les
Allemands de Petite-Rosière. Non
seulement il a été rejoint par le détachement Glasberg, mais il a reçu en
renfort un peloton de 3 chars Hotchkiss du
3e escadron du 5e RAM, sous les ordres de l'aspirant Guignard, et de son
adjoint, le maréchal des logis-chef
Gouya. Ce peloton, qui était arrivé à Neufchâteau
vers 10h30, a reçu l'ordre, vers 17 heures,
d'aller épauler le DD.2-DSE de Fontant; il est arrivé à Petite-Rosière vers 17h30.
A propos de l'action à Petite-Rosière, Glasberg écrit:
«A Petite-Rosière. les AMD du 5e RAM sont au contact. Au sud du village, un petit
bois est tenu par des éléments ennemis. Notre baptême du feu. Le capitaine me donne l'ordre de pousser
une reconnaissance sur le bois. Je pars avec 3 AMR, formant demi-cercle. Nous arrivons rapidement à
la lisière; ouvrons le feu; à la lunette, je vois plusieurs hommes tomber, mais
le bois est solidement tenu; nous sommes abondamment mitraillés; les balles
crépitent sur le blindage, et de la route nous sommes encadrés par plusieurs
obus d'armes antichars. La visibilité devient faible, et nous rejoignons le
capitaine à Petite-Rosière.
Dans un second rapport, le lieutenant
Glasberg écrivait:
«... petit bois tenu par des éléments
ennemis. Aidé de 3 chars Hochtkiss
du 5e RAM, nous détruisons rapidement cette résistance.»
Quand au maréchal
des logis-chef Gouya, du peloton de
chars, il écrit:
«Arrivons à 17h30. Une attaque est
montée, qui a lieu un peu plus tard avec des AMR et motos qui nous ont rejoints. Attaque réussie;
ennemi dispersé; nous nous replions à quelques kilomètres de là, en direction
de Neufchâteau».
Ces Français qui
parlent de destruction de la résistance ennemie, et d'attaque réussie,
exagèrent-ils? NON, car les Allemands eux-mêmes
le reconnaissent. Le sous-lieutenant Obermeier,
qui commandait les deux pelotons allemands (2e et 3e de la 11e Cie/IRGD) de Rosière-Nives-Cobreville,
écrit en effet dans son rapport (35):
«Vers 20 heures, par surprise, 7
chars ennemis débouchent de Vaux-lez-Rosière et passent à l'attaque des positions de notre 3e
peloton. En dépit d'un tir violent de nos armes (Panzerbüchse,
Mi et fusils) à très courte distance,
les chars roulent plusieurs fois (überrollten) sur la position. Puis ils
marchent sur Petite-Rosière,
mais s'arrêtent devant une obstruction postiche placée par nous. A la tombée de la nuit, ils se
replient en direction du Sud. Pendant l'attaque des chars, notre 2e peloton
s'était replié en direction du Nord. A présent, le 3e peloton aussi se replie,
dans un bois tout proche, où il passe la nuit».
(39) A. Bikar: ... NIWI, in RBHM,
n° de juin 1975, p. 153.
Les Allemands ont
donc bel et bien perdu leur position et se sont repliés dans les bois, mais les
Français ont dû s'arrêter à cause de l'obscurité.
A propos des
événements de Petite-Rosière, on lit ceci
dans le compte rendu des opérations de la 5ème DLC:
«Vers Petite-Rosière, le 10 mai, le lieutenant Toussaint et
l'aspirant Stein ont abattu avec leurs armes automatiques 2 avions au moment de
leur atterrissage; avions portant des caisses de munitions avec parachutes. Plusieurs chars ennemis sont touchés
et arrêtés» ... «A signaler en particulier les éléments de Petite-Rosière qui ont débarqué
d'avions du personnel armé d'armes automatiques avec balles perforantes,
dégageant une substance lacrymogène
après impact, de petits mortiers, de lance-flammes portatifs, de Tellermines.
Des échantillons de ce matériel ont été trouvés dans un camion
civil belge, pris par les Allemands, et dont le conductcur a pu ultérieurement s'enfuir et rejoindre
le côté français (matériel transmis au 2e bureau)».
(4) DD.2
et DSE, la nuit du 10 au 11 mai
C'est l'obscurité. Le
capitaine Fontant donne ses ordres pour
la nuit; lui-même reste à Bercheux, avec
le DD.2 et une fraction du DSE; le lieutenant Glasberg, avec 3 AMR et 1 groupe moto, ira se barricader à Lescheret.
Mais les aventures
de Glasberg ne sont pas finies: à 22 heures, arrive un motocycliste, envoyé par
le capitaine, pour dire qu'il faut aller rechercher le lieutenant Combet, parti en reconnaissance vers Sûre. Glasberg
part avec 2 AMR mais il a à peine roulé 2
kilomètres qu'il est bloqué par une barricade faite de gros troncs d'arbres; il
revient à Lescheret et rend compte au
capitaine. Ce dernier, à 23 heures, envoie un message: ramener Combet à tout prix avant l'aube du 11 mai. Glasberg
repart donc mais cette fois avec le groupe moto, qui contourne la barricade en
passant à travers champs. Combet est
trouvé à Sûre; il est au contact et, ne sachant où se replier, s'est barricadé
pour la nuit. Averti par Glasberg, il part aussitôt rejoindre le capitaine à Bercheux, tandis que Glasberg retourne à Lescheret.
b) Devant le Sous-Groupement Sud
Devant le Sous-Groupement Sud du Groupement Est de la 5ème DLC (colonel du Passage: 60e GRDI, IIe groupe du 11e Cuirassiers, 1 peloton du Se EDAC), il y a un détachement «DD-DSE», commandé par le capitaine de Chabot, ayant sous ses ordres 2 pelotons de son
escadron, le 4e (motocycliste) du 5e RAM: le 1er peloton du lieutenant
Baudouin, et le 4e du lieutenant Koltz.
Le capitaine de Chabot et le peloton Baudouin, à Martué, empruntent la branche Nord de l'itinéraire
secondaire du Groupement Est, et passent donc par Straimont, Hosseuse et Assenois pour arriver au chemin de fer Namur-Arlon à Bernimont. Le
peloton Koltz, à Martué, a pris la route de Suxy puis, par Les Fossés, arrive au chemin de fer à Naleumont. Les pelotons Baudouin et Koltz ont atteint leurs objectifs vers 8h45.
Cette arrivée au
chemin de fer des premiers Français, tant du détachement de Chabot, que de l'avant-garde du 60e GRDI et du DD-DSE
d'extrême gauche de la 2e DLC, est
confirmée par plusieurs témoignages belges. Le lieutenant Dardenne, de la compagnie moto du 1er Chasseurs Ardennais, arrivé à Léglise vers 8 heures, écrit en effet:
«Vers 9h30, je prends contact avec un
officier français commandant une pointe motorisée, arrivée depuis 9 heures sur
le chemin de fer de Namur.»
On lit dans un autre document belge de la
10e Cie/ler ChA.:
«9h30: arrivée à Léglise (carrefour grand'route) d'un motocycliste français venant de Mellier; il rebrousse chemin après un
court arrêt. Peu après, le lieutenant Dardenne pousse une pointe vers Mellier et y trouve une
reconnaissance motocycliste française installée au passage à niveau. II parla
avec l'officier qui la commandait, qui lui dit avoir reçu pour mission de
s'installer à hauteur du chemin de fer».
(1) Que devient ensuite l'escadron de Chabot?
Mais revenons aux
Français de l'escadron de Chabot. Vers 11
heures, ils sont rejoints par l'élément le plus avancé du Gros du Sous-Groupement Sud: un peloton antichars du Se EDAC. Le lieutenant Koltz écrit dans son rapport que (vers 11 heures) on observe une
«descente de parachutistes allemands aux environs de Léglise (un bataillon environ)». Et, vers 11h30,
arrive une pointe d'avant-garde commandée par le lieutenant de la Morandière du 1er escadron du 60e GRDI. Koltz ajoute: «Engagement avec les parachutistes
allemands, qui se replient dans les bois de Léglise».
Les gros des
colonnes françaises étant arrivés au chemin de fer vers 16 heures, le
détachement de Chabot reçoit l'ordre, à
16h30, de se porter en avant jusqu'à l'objectif suivant, c'est-à-dire Rauvillers, sur la transversale Bastogne-Martelange-Arlon. Il part à 19 heures. A Wittimont, des barricades interdisent toute
progression, et le détachement s'arrête. Mais, comme un groupe de cavaliers
ennemis a été signalé à la lisière des bois à l'est du village, le lieutenant Koltz, le maréchal des logis Lechardon et quelques hommes partent en patrouille à
19h30. Koltz écrit:
«Rencontre à la lisière d'un bois
avec un détachement allemand à cheval, composé de 23 cavaliers. Surprise
complète de l'ennemi, qui laisse prisonnier un adjudant-chef, commandant le
détachement, ainsi que des chevaux et un matériel important, entre autres un
poste de radio».
Les archives du 5ème
RAM nous apprennent que le soldat français Varone
a été blessé et que 7 chevaux allemands ont été capturés; les harnachements ont
été mis hors d'usage et les animaux abandonnés; le poste de radio
émetteur-récepteur de campagne a été mis sur une voiturette de canon de 25.
Ne pouvant déboucher de Wittimont à cause des obstructions, le détachement de Chabot s'installe défensivement dans la localité pour
la nuit.
(2) Qui étaient ces cavaliers allemands
dans la région de Wittimont?
Les dires du lieutenant Koltz sont confirmés (36)
- par la 6e compagnie du 1er Chasseurs
Ardennais dont le carnet de campagne mentionne:
«Repli commencé à Habay-la-Neuve vers 16h30; awivée à Ncufchâteau vers 18h30. Pas
d'incidents, sauf tirs par FM sur 9 cavaliers ennemis qui s'enfuient vers Wittimont»;
- et
dont le lieutenant Decker écrit:
« Arrivés à Rancimont, échangeâmes quelques coups
de feu avec un détachement de cavaliers allemands. Toutefois ceux-ci
n'insistèrent pas et s'enfuirent en hâte».
-par le rapport du capitaine Pillafort, commandant le 3e escadron du 11e
Cuirassiers, qui tient la voie ferrée au sud de Neufchâteau: (10 mai). Pillafort reçoit
du capitaine de Chabot le premier
prisonnier allemand fait par le DSE:
«C'est un gradé de cavalerie à
cheval; 32 ans; a fait la guerre de Pologne. Sa formation vient du Luxembourg,
et ils ont fait 90 kilomètres dans la journée. Le sous-lieutenant de Saint-Mathieu (NDLR: aussi du 3e
escadron) reconnaît et arrête une patrouille de cavalerie allemande à 600
mètres au nord de la voie ferrée»
(36) - CDH: carnet de
campagne de la 6e Cie du 1er Chasseurs Ardennais;
- SHF: 11e Cuirassiers:
rapport du capitaine Pillafort (3e Esc);
- Gounelle: Sedan, mai 1940, p. 102 (situe I'affaire erronément le 11 mai,
au lieudit 10): «Escadron de Chabot ..., surprenant un groupe de cavaliers allemands, en tue 2, fait
prisonnier le chef de peloton et met en fuite le reste du détachement»;
-Ornano: La
5e DLC
dans les Ardennes belges, p. 27: «A l'extrème droite, le DSE marchant devant le 60e GRDI est accroché à Wittimont».
(3) Mais d'où venaient donc ces cavaliers
allemands?
La seule division de
cavalerie allemande était entrée dans le nord de la Hollande. Les seuls autres
cavaliers allemands (à cheval) étaient ceux du peloton d'éclaireurs des
régiments d'infanterie, et ceux de l'escadron à cheval des groupes de
reconnaissance des divisions d'infanterie. Encore ne s'agissait-il normalement
que des unités actives, car dans les unités de réserve, ces «cavaliers» étaient
à vélo. Compte tenu des renseignements trouvés dans les archives des divisions
allemandes ayant traversé la Belgique (photocopies au CDH), les cavaliers de Wittimont devaient, semble-t-il, appartenir à l'escadron à cheval du
groupe de reconnaissance de la 16e Infanterie Division. Les éléments les plus
avancés de ce groupe étaient en effet, le 10 mai dès 8h30, arrivés à Tintange. De la frontière germano-luxembourgeoise à Tintange il y a, à vol d'oiseau, environ 35 Km et, de Tintange à Wittimont,
encore environ 17, soit au total 52 Km. Et par les routes et chemins il y en a
encore bien plus! Comment ces cavaliers auraient-ils
pu parcourir une telle distance en un jour? Peut-être chevaux et hommes
avaient-ils été transportés partiellement en camions?
IV. - LA PROGRESSION DES GROS DES
COLONNES DE LA 5ème DLC
A 8h45, le général
Chanoine, commandant la 5ème DLC, a
prescrit de poursuivre le mouvement vers le 2e objectif, c'est-à-dire la transversale
0.2: la voie ferrée Namur-Arlon, entre Poix-Saint-Hubert et Les Fossés.
1. - AU GROUPEMENT OUEST
a) Le 64e CRDI
Le 64e GRDI
a reçu l'Alerte n° 3 (se porter jusqu'à
la frontière) à 6 heures, et l'Alerte n° 4
(entrer en Belgique) à 7 heures. Il franchit la frontière à 9 heures. Sa sûreté
rapprochée est assurée par le peloton de Toulgoët
(du 3e escadron) qui a l'ordre d'occuper les ponts de Alle, Hour et Poupehan,
tout en laissant un groupe à la maison forestière de Brulé, à May. Le
64e GRDI progresse dans l'ordre suivant:
- 2 pelotons du 2e
escadron (moto):
- Reverdy, qui à la Semois
doit renforcer Toulgoët et prendre la
liaison, à Mouzaive, avec le 2e Spahis
Marocains, élément d'extrême droite de la 9e Armée
- Paulmier
- le peloton de commandement du 2e escadron
- 1 groupe Mi du
peloton Berger, et un fusil antichars «Boyd»,
du 3e escadron (de Mi et engins)
- le peloton Meyer
(du 2e escadron)
- l'état-major du
Groupe
- le restant du 3e
escadron
- le 1er échelon
des Trains de Combat (TC.1; lt Parouty)
- le 1er escadron (à cheval)
- le 2e échelon des Trains de Combat (TC.2) et les Trains de Ravitaillement (TR) (capitaine Girade).
La tête du 64e GRDI arrive à Alle (transversale 0.1) à 11 heures; la liaison
avec le 12e Chasseurs à cheval est trouvée à Poupehan, au carrefour des Chambrettes, mais celle avec le 2e Spahis
Marocains à Mouzaive ne se fait pas. A
midi, départ de Alle pour Paliseul sur 2
itinéraires: au Nord par Cornimont et Carlsbourg: 1 peloton du 2e escadron, le 1er moins 1
peloton, et une fraction du 3e; au Sud par Menuchenet:
le 2e escadron (- 1 peloton), l'état-major, le 3e escadron moins 1 fraction, et
1 peloton du 1er.
A Paliseul, les deux fractions du 64e GRDI se rejoignent; il n'y a pas d'arrêt et le groupe
continue sa progression par Anloy et
Glaireuse vers 0.2, c'est-à-dire la Lomme
(coïncidant, à part ses méandres, avec le chemin de fer Namur-Arlon), dans l'ordre: 2e escadron, état-major et
3e, puis 1er. La transversale 0.2 est atteinte par les motocyclistes vers 18
heures, «après le franchissement d'abattis faits par les Belges au sud du
ruisseau. Aucun élément belge n'occupe cette coupure». La liaison est prise à
gauche avec le DD-DSE du lieutenant Josset, qui opère plus au Nord, et à droite avec le
12e Chasseurs à cheval.
L'état-major du 64e GRDI et le 3e escadron (sauf le peloton de Toulgoët laissé à Paliseul
avec un groupe Mi) s'installent à Libin-Bas
vers 18h30; le 1er escadron y arrive vers 20 heures, et occupe aussitôt les lisières
Nord du village. Au même moment arrive à Libin-Haut
le 2e Spahis Marocains, qui y installe son PC régimentaire et pousse ses
escadrons vers la coupure de la Lomme. La
liaison entre l'extrême gauche de la cavalerie de la 2e Armée, et l'extrême
droite de celle de la 9e, est donc effective. A 23 heures, le canon de 37 et
les deux Mi qui étaient en réparation à Verdun, rejoignent Libin-Bas; mais hélas la lunette du canon de 37 a
disparu, et la pièce ne sera donc plus utilisable qu'aux distances très rapprochées.
Ajoutons que la 3e
batterie du 78e régiment d'artillerie est arrivée à Libin-Bas.
b) Le 12e Chasseurs à cheval
Notons que, le 9
mai, il manque des chevaux au 12e Chasseurs, si bien qu'au 4e escadron, deux
des quatre pelotons sont cyclistes.
Le 10 mai, c'est le
3e escadron qui fait l'avant-garde, et en tête se trouve le peloton Manet, qui
arrive à la frontière belge à 8h15, et y attend le DD.1 et le DSE, qui
bientôt sont là et le dépassent. A 9h 15, le 12e Chasseurs atteint la ligne Sensenruth-Noirefontaine. Ensuite, à Plainevaux, le 4e escadron se détache et progresse
vers Offagne et Jehonville. A 13 heures, le régiment atteint son
deuxième objectif: la forêt de Luchy. Le DSE achève de le dépasser. Lors de son passage à Bertrix, le 2e escadron a capturé des aviateurs
allemands descendus en parachute. A 15h30 arrive l'ordre de reprendre la marche
en avant, pour aller tenir la voie ferrée Namur-Arlon,
et particulièrement Libramont. Vers 17
heures, cette localité est occupée par le 3e escadron (+ 1 groupe Mi et
1 canon de 25), qui à la voie ferrée surveille un front d'environ 4 kilomètres,
et prend la liaison à l'Ouest avec le 4e, arrivé par Ochamps, et à l'Est avec le 2e, passé par Bertrix. Le 4e escadron de part et
d'autre de la route de Recogne à Saint-Hubert, occupe la voie ferrée à l'ouest du 3e,
et la lisière Sud du bois de Warinsart; il
est en liaison à gauche avec le 64e GRDI.
Au 2e escadron, 3
pelotons sont au chemin de fer (d'Ouest en Est: pelotons Bazaille, Dorange + un groupe Mi, et Baijot); le canon de 25 en renfort garde la route de Neufchâteau; le PC de l'escadron est à La Mouline; la
liaison est prise à droite avec le 11e Cuirassiers. Le 1er escadron, en
soutien des autres et en couverture de l'artillerie, est sur la cote 495, à 2
kilomètres environ au sud-ouest de Recogne.
Le PC régimentaire s'installe à 2 kilomètres à l'ouest de Libramont; un groupe Mi y est placé en défense contre
avions.
Libramont était occupé le 10 mai par la
Ire compagnie du 2e Chasseurs Ardennais. D'après le JMO du 3e escadron du 12e Chasseurs à cheval français:
«- à 18h30 les Belges
reçoivent l'ordre de se replier».
«- a 21 heures Ia défense du village (par les
Français donc) est réalisée. Le 3e escadron a été renforcé d'un 2e canon de 25
et d'un groupe motocycliste du 15e RDP. Le «cerclage» (de la localité) est terminé; les
missions connues; les dispositifs de mines pris par notre Génie. A partir du 21h30 les ponceaux de la voie ferrée
commencent à sauter. Seul subsiste le pont de la grand'route franchissant la voie ferrée, qui ne doit
sauter qu'après le retour de la Découverte, sur ordre du capitaine. A minuit et
demi arrive le ravitaillement ainsi que le lieutenant de la Chapelle rentrant
de permission. Il reçoit aussitôt le commandement d'un groupement comprenant son
peloton, le peloton Manet et 1 groupe Mi qui a rejoint vers 16 heures».
c) En 2e échelon du Groupement Ouest
Le 2e échelon du
Groupement Ouest était constitué par le IIe
bataillon (moins le Se escadron, qui est en DSE)
du 15e RDP, renforcé par 1 groupe de 2
canons de 25 du peloton Martin du Se EDAC,
et 1 peloton de chars du 3e escadron du Se RAM. Ces éléments s'installent à Bertrix. En soutien, à la Semois, il y a le Ier
bataillon du 295e régiment d'infanterie.
d) Le PC du général Brown de Colstoun
Ce général qui
commande le Groupement Ouest, s'est installé d'abord à Plainevaux, puis à Ochamps.
C'est là que s'établit aussi, le soir, le capitaine Lopin, qui commande la
compagnie de Sapeurs mineurs n° 34/1,
dont la section TT de l'adjudant-chef Coudert prépare des destructions dans la région de Vivy, et dont la demi-section
moto du sergent-chef André travaille sur les positions du 12e Chasseurs à
cheval.
2. - AU GROUPEMENT EST
Le Groupement Est de la 5ème DLC, sous les ordres du colonel Evain (commandant de la 15e BLM), est subdivisé en deux sous-groupements:
- le
Sous-Groupement Nord, sous les ordres du colonel Labouche (commandant du 5e Cuirassiers), comprend:
- 1 peloton de
chars du 3e escadron du 5e RAM
- le 11e
Cuirassiers, moins son IIe groupe
- le IIe groupe du 78e RA
- 2 canons de 47 de
la 10e BDAC
- la section camionnettes de la Cie de Sapeurs-mineurs 34/1
- en 2e échelon: le
Ier bataillon du 15e RDP (moins le 1er escadron d'AMR et motos, qui est en DSE);
- le
Sous-Groupement Sud, sous les ordres du lieutenant-colonel du Passage
(commandant du 60e GRDI), comprend:
- le IIe
groupe (commandant Le Balle) du 11e Cuirassiers
- le 60e GRDI
- 1
peloton de canons de 25 du 5e EDAC.
En réserve du Groupement il y a le
restant du 5e RAM (1 peloton d'AMD, 2 de
chars, et 5 de motocyclistes), c'est-à-dire les éléments qui ne sont ni en DD ni en DSE. Enfin,
à la Semois, il y aura le IIIe bataillon du 12e Zouaves, en soutien.
a) Les événements du 10 mai au Sous-Groupement Nord
Le 11e Cuirassiers
est alerté le 10 mai à 6 heures seulement ... or, à ce moment, beaucoup de ses
éléments sont déjà partis à l'exercice. Il faut donc les rappeler au
cantonnement, puis leur donner l'équipe ment prévu pour le cas d'entrée en
Belgique. Si bien que les escadrons ne peuvent partir qu'assez tard: le 2e à
9h45, le 1er à 10 heures... Le PC régimentaire démarre à 10h15 et, après un arrêt d'une heure à Blanc-Sarts, où le colonel Labouche se concerte avec le colonel Evain, va franchir la Semois à Mortehan et aux
ardoisières de la côte de Villebauroche (2
Km à l'est de Mortehan). Le Ier groupe (ler et
2e escadrons) passe la rivière entre 13 et 14 heures. Le capitaine Grognet, commandant le 2e escadron, écrit que son
unité marche en deux colonnes sur deux itinéraires à peu près parallèles, se rejoignant
à Gribomont: le groupe de commandement et
les pelotons Thomas et Venturini, par
Maison Blanche et Mortehan; les pelotons Meaudre et Rothschild, par Muno et Herbeumont.
Les 1er et 2e escadrons atteignent sans
incident, entre 15 et 16 heures, leur objectif du jour: la transversale 0.2,
c'est-à-dire la voie ferrée Namur-Arlon. Le
11e Cuirassiers (moins son IIe groupe),
en ler échelon, s'établit comme suit:
- le PC régimentaire, d'abord à Neufchâteau, s'installe ensuite à Petitvoir;
- le
1er escadron (capitaine Beau) à Tournay;
- le 2e escadron
(capitaine Grognet) à Neufchâteau, de manière à empêcher le franchissement
de la voie ferrée, et défendre les sorties de la ville vers l'Est.
A 17 heures, le
colonel Labouche reçoit du colonel Evain l'ordre de prendre sous son commandement les
éléments de la Découverte du capitaine Fontant
et de faire exécuter deux reconnaissances, l'une sur Morhet, l'autre sur Remichampagne. Dans les pages précédentes, nous avons longuement évoqué
les aventures du DD.1 et du DSE.
Vers 20 heures, des
éléments de l'escadron de Chabot (DSE du Sous-Groupement Sud, dont nous avons parlé plus haut),
refoulés de Wittimont, arrivent à Neufchâteau. Alors par prudence, le capitaine Grognet fait sauter la destruction de Hamipré, où malheureusement un accident se produit:
l'adjudant-chef d'Acheux est évacué par
ambulance sur Neufchâteau.
Le 1er escadron se replie pour la nuit sur Fineuse, qu'il organise défensivement; il reprendra sa
position au chemin de fer le 11 mai dès 5 heures.
Le Ier bataillon du 15e RDP constitue
le 2e échelon du Sous-Groupement derrière
la haute Vierre, à Gribomont et Straimont.
b) Au Sous-Groupement Sud
Au II Groupe du
11e Cuirassiers, c'est le 3e escadron (capitaine Pillafort) qui fait l'avant-garde. Parti d'Escombres à 9 heures, il entre en Belgique à 9
heures 10 et progresse vers Nolinfaing, par
Chassepierre, Laiche, Martué et Straimont.
Entre Assenois et Nolinfaing il est attaqué par un avion allemand, qui
lui tue 2 chevaux donc celui du trompette Sellier. Arrivé au chemin de fer Namur-Arlon vers 16 heures, le 3e escadron prend la
liaison à gauche avec le 2e élément de droite du Sous-Groupement Nord et à droite avec le ler escadron du 60e GRDI. Le 4e
escadron du 11e Cuirassiers reste en réserve.
Au 60e GRDI, seul le
1er escadron (à cheval) s'établit au chemin de fer, à la droite des
Cuirassiers, jusqu'à Les Fossés. Le 2e escadron (moto) et le 3e (Mi et canons)
s'installent en bretelle sur la ligne Neufchâteau-Straimont,
à Montplainchamps.
3. - LA RÉSERVE DE LA DLC
Cette réserve est
constituée essentiellement par le 12e GRCA
(dont les escadrons possèdent en tout 3 canons de 25 et 1 canon de 37). Ce
groupe de reconnaissance est diminué des 2 pelotons moto affectés au DD-DSE marchant devant le 64e GRDI, mais renforcé par 1 section de 2 canons de 47 de
la 10e BDAC. Le 12e GRCA, progressant par Saint-Menges, Fleigneux et Bouillon, s'établit en position défensive à
hauteur du carrefour de Menuchenet, et à Fays-les-Veneurs.
En fin d'après-midi du 10 mai, le Ier bataillon
du 295e régiment d'infanterie est avancé jusqu'à la Semois de la région de Bouillon.
V. - VUE D'ENSEMBLE DE LA 5e DLC ET DES ALLEMANDS D'EN FACE, LE SOIR DU 10 MAI
1. - LA 5e DLC
a) Vers 15 heures
A ce moment, la 5e DLC était répartie comme suit sur le terrain:
Groupement Ouest:
-
DD.1 à Mabompré, DSE à Libramont
- Avant-gardes
des Gros: à Ochamps et Recogne
- Têtes
des Gros: à Paliseul, Offagne,
Fays-les-Veneurs, gare de Bertrix
Groupement Est:
- DD
2 et DSE: à Vaux-lez-Rosière, Sûre, Ebly
- Avant-gardes
des Gros: à Neufchâteau
- Têtes
des Gros: à Gribomont et Straimont
Soutien
d'infanterie.
- I/295e RI à Sedan; III/12e Zouaves à Carignan.
b) Le soir
Le DD2 et les DSE ont
établi une ligne de surveillance passant par Amberloup, Laval, Morhet,
Bercheux, Lescheret, Ebly et Wittimont. Le
DD.1, obligé de se replier par Marche et Rochefort, est momentanément perdu pour la 5e DLC, qui ne le récupérera que le 11 mai. Les Gros (de
l'Ouest vers l'Est: 64e GRDI, 12e
Chasseurs à cheval, 11e Cuirassiers et 60e GRDI)
sont à la Lomme et à la voie ferrée Namur-Arlon, entre Poix-Saint-Hubert
(ex) et Mellier (ex). Un second échelon est constitué par le II/15e RDP à Bertrix,
et le I/15e RDP à Gribomont et Straimont.
La réserve
divisionnaire, à Fays-les-Veneurs, comprend:
- le restant du 5e RAM (des AMD et motocyclistes pour faire un DD en cas de nécéssité, et 2 pelotons de chars)
- le 12e GRCA (éléments à cheval et motorisés non utilisés en DSE)
- le
restant de la batterie divisionnaire anti-chars
- des éléments de la compagnie de Sapeurs-mineurs 34/I (le capitaine Lopin a son PC à Ochamps).
Le PC divisionnaire,
établi à 14 heures à la «Maison Friquet» (route
de Bouillon, à 8 Km de Sedan; c'est l'une
des «Maisons Fortes» organisées en avant de la position principale de la 2e
Armée), va le soir au bois Monty, entre Bertrix et Fays-les-Veneurs,
sauf sa fraction arrière, restée à Bazeilles.
Ajoutons qu'un «soutien
d'infanterie» s'installe à la Semois:
ce sont deux bataillons: le I/295e RI à Corbion, et le IIIe
du 12e Zouaves entre Bouillon et Chassepierre.
2. - LES ALLEMANDS EN FACE DE LA 5e DLC
Comme dit plus haut,
les 3 Panzers constituant le XIXe Corps
du général Guderian n'ont pas atteint
leurs objectifs du jour (Libramont,
Neufchâteau, Florenville) et, le soir, leurs éléments les plus avancés ne sont
respectivement qu'à Menufontaine (2e
Panzer), Fauvillers (1ère Panzer) et Marbehan (10e Panzer). Les aérotransportés ayant
réalisé l'opération NIWI (IIIe bataillon
de l'IRGD), venant de la région Traimont-Witry, ont fait leur jonction avec la 1ère
Panzer entre Fauvillers et Bodange, sauf un groupe de deux pelotons qui, refoulé
par les Français, est dans un bois au nord de Nives.
Entre ces Allemands
et les positions de la 5e DLC au chemin
de fer Namur-Arlon, il n'y a plus aucun
Belge. Et les DD-DSE, qui n'ont qu'une
mission de surveillance, sont disséminés sur un front énorme... comme
d'ailleurs aussi les unités tenant la position principale.
3. - LES BELGES
a) Le repli dans la «Position d'Arrière-Garde», vaste arc de cercle appuyé à la
Meuse de Huy, passant par-
Somme-Leuze, et longeant l'Ourthe de Petit-Han à Comblain-au-Pont
A 13h20, le général Descamps, commandant la 1ère D.Ch.A., a prescrit au 1er ChA de se replier sur le chemin de fer Bastogne-Libramont. A 15h20, le 2e ChA a fait savoir qu'il reportait sa défense à l'ouest
de Bastogne. A 18h45, le général Keyaerts, commandant le Groupement K, a dit à la 1ère D.Ch.A. de faire replier les 1er et 2e ChA, «à la chute du jour», sur la Position d'Arrière-Garde.
La Cie de Neufchâteau (7e/ler ChA) quitte la ville vers 9 heures
du soir. La Cie de Libramont (Ire/2e ChA), après le passage de diverses unités venant du
Sud, se replie à son tour, peu après 23 heures. Et, dans la nuit du 10 au 11
mai, les colonnes des Chasseurs ardennais, remontant vers le Nord, entrent dans
la Position d'Arrière-Garde à Somme-Leuze, ou par les ponts de l'Ourthe à Petit-Han,
Durbuy, Barvaux, Bomal et Hamoir.
b) Les dispositjfs de destruction
En se repliant, les
Chasseurs ardennais ont réalisé les destructions prévues, sauf bien entendu
dans les régions de Neufchâteau et Libramont, où les Français se sont établis. Le groupe
de «Libramont Recogne» (LR) comptait 14
destructions (LR. I n° 1 à 11, et LR. II n° 1, 2 et 3), et celui de Neufchâteau (Nf) 7 destructions (Nf. 1 à 7). Chaque poste de destruction comptait un
gradé et 4 chasseurs.
(1) A Libramont-Recogne
A 12h10, le
lieutenant Moreau de la 1ère Cie/2e ChA signale à l'état-major du ler ChA qu'un détachement du génie français vient
d'arriver à Libramont, et a pour mission
de miner le pont de Neuvillers et aussi
de reconnaître les dispositifs de destruction de Recogne et du pont de Libramont
(Ndlr: donc les dispositifs LR. I n° 1, 5
et 8, et peut-être aussi 6 et 7 au chemin de fer). A 17h10, les Français
demandent et obtiennent délégation pour décider du moment du sautage de LR. I/1,
5 et 8.
A 19h30, le ler ChA annonce à la 1ère D. Ch. A. que les
dispositifs LR ont sauté, sauf LR. II/1, 2 et 3 et LR. I/4 (pont ferroviaire près de Serpont,
sur la route de Recogne à Saint-Hubert). Ces 4 dispositifs n'ont pas sauté
probablement à la demande des Français, qui ont encore des troupes en avant. Et
les dispositifs pour lesquels les Français ont délégation n'ont évidemment pas
encore sauté non plus, puisqu'ils sont sur la position française ou en arrière.
Au message de 19h30 du ler ChA, la 1ère D.Ch.A. répond qu'il faut faire sauter LR. I/4 et LR.I/3;
ce qui sera probablement fait car, bien que LR.I/4
coupe la route de Saint-Hubert, il reste
le pont de Libramont (LR.I/1) pour le repli
des éléments avancés (DD-DSE). Et LR. II/1, 2, 3 ? Les archives sont muettes en ce qui
concerne le moment du sautage.
(2) A
Neufchâteau
A 13h04, le 1er ChA signale au Groupement K que les Français
sollicitent une délégation de pouvoirs concernant le dispositif de sautage Nf. 6 (route de Bertrix, à la sortie ouest de Neufchâteau).
Le Groupement K marque son accord; Nf. 6
ne sautera que «sur ordre du commandant français de Hamipré».
Le sous-lieutenant Fairon, de la 5e Cie du ler ChA, était détaché à Neufchâteau, comme commandant du groupe des 7 dispositifs de
destruction. Dans son rapport du 23 février 1949, il écrit:
«Je fais partie de la 5e
compagnie du fer Chasseurs ardennais et suis détaché à Neufchâteau où je commande le
détachement de destruction Nf. J'ai sous mon commandement
7 postes de garde, et je dépends directement de l'état-major du 1erChA. Chaque
poste se compose de 4 chasseurs et d'un gradé...
10h30: arrivée des premiers Français.
15h heures: l'état-major
régimentaire s'en va à Freux. Je dépends de lui pour le sautage de 4 destructions (Ndlr: Nf. 3, 4, 5 et 7). Pour les 3
autres je dépends des Français sous les ordres desquels je suis placé au moment
du départ de mon régiment.
18h30: ordre de mise à
feu de Nf. 3, 4, 5, et
7, reçu par indicatif du commandant Krack (adjudant-major du 1er ChA). Je me rends moi-même à ces postes, où les chefs
de poste les font sauter sous mes yeux. (Ndlr: Nf. 5 saute à 18h45, Nf. 3 et 4 à 18h55, et Nf. 7 à 19h15).
19h30: rentré à mon PC,
où je peux rendre compte de l'accomplissement de ma mission. Téléphone coupé.
Les hommes des postes sautés se replient vers Saint-Hubert. Destruction du central téléphonique
comme prévu. Je relève uniquement des Français après l'accomplissement de ce sautage.
20 heures: un de mes camions conduit
à Libramont des rescapés
de la 5e Cie.»
Rappelons que c'est
cette 5e Cie qui a si bravement combattu à Bodange
contre la 1ère Panzer, et à Strainchamps contre
la 2e. Nous verrons plus loin ce que deviendront Fairon et ses chasseurs le 11 mai.
VI. -
LES ORDRES DU COMMANDANT DE LA 2e ARMÉE FRANÇAISE ET DU COMMANDANT DE LA 5ème DLC, DANS LA NUIT DU 10 AU 11 MAI
La situation de la 2e DLC, le soir du 10 mai, rend nécessaire le retrait
vers l'Ouest de la droite de la 5e. Ce retrait est prescrit le 10 mai à 22
heures par le général Huntziger, commandant
la 2e Armée française. En conséquence, le 11 mai à 4h45, le général Chanoine,
commandant la 5e DLC, ordonne ce qui
suit:
- au Groupement
Est:
- limite latérale
droite: une ligne passant par Chassepierre
(inclus) et Straimont (exclu); liaison à
droite avec la 1ère BC
- le sous-groupement Sud (II/1 le Cuirassiers et 60e GRDI)
doit pivoter sur sa gauche et orienter son dispositif face à l'Est (même
le Sud-Est) entre Neufchâteau et Straimont.
- axe d'effort: Neufchâteau,
Gribomont, Herbeumont.
- PC du Groupement: à Petitvoir
- le I/15e RDP reste
où il est (La Vierre, entre Gribomont et Straimont)
- au Groupement Ouest: pas de changement
- la ligne de surveillance des DD et DSE ne
change pas non plus.
Au cours de la nuit,
conformément aux ordres reçus par la 1ère
BC, le ler Hussards étendra sa gauche jusqu'à Straimont. Mais au Groupement Est de la 5e DLC, 1'aile droite, c'est-à-dire le sous-groupement Sud du lieutenant-colonel du Passage (II/11e Cuirassiers et 60e GRDI) n'occupe pas encore ses nouvelles positions à
l'aube du 11 mai, et sera surpris par l'ennemi en plein mouvement.
E. - LA JOURNÉE DU 11 MAI
I. -AU GROUPEMENT OUEST
1. - LE DD-DSE GOSSET
Le DD-DSE du lieutenant Gosset, qui opérait devant le 64e GRDI,
est semble-t-il rentré dans les lignes dans le courant de la matinée du 11 mai,
puis a été replié vers Menuchenet, dont
il va assurer la défense avec des éléments du 5e RAM et du 15e RDP.
2. - LE DD.1 ROUGIER ET LE DSE
Le DD.1 du commandant Rougier
ayant été, comme dit plus haut, obligé de se replier, à cause des destructions
belges, via Marche et Rochefort, c'est-à-dire
dans le secteur de la Ire DLC, voisine de
gauche de la Se, c'est le DSE Ribes (5e escadron/II/15e
RDP) qui prend à son compte la mission de découverte. Durant la nuit du 10 mai
au 1 1 mai il était en surveillance sur la ligne Laval-Morhet. Il semble bien qu'à l'aube du 11 mai il soit parti en
reconnaissance plus loin vers l'Est, puisque les archives de la 3e Infanterie
Division allemande nous apprennent qu'à Flamierge,
les Allemands ont vu apparaître des autos mitrailleuses françaises.
D'après le JMO du 12e Chasseurs à cheval, «à 7 heures, un élément
du DSE franchit le pont de Libramont et rentre dans nos lignes. Il déclare avoir
été encerclé toute la nuit» (à Laval et / ou Morhet ?). A 10 heures, le DSE est au contact de l'ennemi à Remagne (10 Km au nord-est de Libramont). La patrouille mixte d'AMR et motos du lieutenant de Villelume est particulièrement active. Les deux
dernières AMR venant du Nord repassent à
midi le pont de Libramont, que les
sapeurs font alors sauter. Le DSE va
prendre place dans les arrières du Groupement Ouest.
3. - LE 64e GRDI, À L'EXTRÊME GAUCHE DU GROUPEMENT
A minuit, le Groupe
reçoit la visite du général de Colstoun, qui
prescrit de faire prolonger la droite du 2e escadron (moto), au chemin de fer,
par 2 pelotons du ler (à cheval),
installé aux lisières Nord de Libin-Bas. Les
pelotons Gaullier et Joffre sont désignés, et partent à l'aube. A 9 heures,
le 64e GRDI reçoit 2 canons de 25 portés,
mis à sa disposition par la 5e DLC, mais
ces canons n'ont ni munitions, ni personnel. On les fait alors servir par
l'équipe du fusil antichars Boyce et l'on
prélève des munitions sur celles du canon de 25 hippomobile.
A 11 heures, le
général de Colstoun ordonne le repli sur
la transversale 0.2 (Paliseul). Cet ordre
est causé par les événements à la droite de la 5e DLC ainsi qu'à ses voisines de droite (1ère BC et 2e
DLC). Et le 64e GRDI quitte donc vers midi le chemin de fer et la
coupure de la Lomme sans avoir eu de
contact avec l'ennemi. L'escadron à cheval est couvert par celui de fusiliers
motocyclistes. Une AMR du DSE, en panne, est détruite, ainsi qu'un dépôt
d'essence belge. Sur ordre du lieutenant Cornilleau,
officier des Transmissions, les téléphonistes du groupe, aidés de 3
téléphonistes militaires belges trouvés à Libin-Bas,
detruisent le réseau et les postes téléphoniques locaux.
Vers 15 heures, le
lieutenant-colonel Mallet établit son PC
dans une ferme isolée, entre Paliseul et Menuchenet. Le repli sur 0.2 a été préparé par le
peloton de Toulgoët (du 3e escadron),
laissé la veille à Paliseul avec un
groupe Mi.
A 16 heures, vu la
progression rapide de l'ennemi sur la droite, arrive l'ordre de se replier sur
la Semois sans s'arrêter sur 0.2, où
d'ailleurs les escadrons ne sont pas encore arrivés. Le lieutenant colonel Mallet leur envoie des délégués
pour les avertir, et va établir son PC à Menuchenet.
Le capitaine Hollier trouve l'escadron à cheval pied à terre, au
sud d'Anloy. Violemment attaqué par des
avions volant bas, il a plusieurs sous-officiers et cavaliers blessés, et de
nombreux chevaux blessés ou échappés. L'escadron, échelonné par petits paquets
à proximité de la route, a une grande profondeur. L'escadron monté, qui couvre
la retraite, a été obligé de stopper. L'escadron à cheval reprend sa marche,
mais à travers champs, de couvert en couvert. L'escadron moto cesse alors de le
couvrir et roule jusqu'à Menuchenet. Lorsqu'il
arrive à ce carrefour vers 17 heures, la défense y est assurée par le DD-DSE du lieutenant Gosset, ainsi que par des éléments du 5e RAM (ex-DD.1) et du 15e RDP (ex-DSE). Les blindés ennemis ont atteint les abords du carrefour,
et un combat violent a lieu. Dès que son escadron moto a dépassé le carrefour,
le lieutenant-colonel Mallet ordonne la
mise à feu des dispositifs de destruction préparés par les sapeurs de la
compagnie 34/1.
Vers 19 heures,
l'état-major et les escadrons motorisés (2e et 3e) du 64e GRDI atteignent la Semois
à Alle. L'escadron à cheval (1er) ayant
été obligé de passer par Carlsbourg, n'arrive
à la Semois que vers 21 heures, et le
groupe de canons de 25 à 21 h30. Le capitaine Gerdes et le peloton Gaullier (du
1er) manquent; ils rejoindront
heureusement le 12 mai.
L'occupation de la Semois, d'Alle à Poupehan,
est réalisée vers 20 heures.
- à A /le, il y a
le PC du Groupe, ceux des 2e et 3c escadrons, ainsi que les pelotons Meyer et
Lefèvre (du 2e) et l groupe de canons de 25 du 5e EDAC;
- à Hour, il y a
les pelotons Reverdy (du 2e) et Berger
(du 3e), avec un canon de 37;
- à Poupehan, il y
a les pelotons Paulmier et Gosset, avec un canon de 25 porté;
- à Frahan, il y a le peloton de Toulaoët.
L'escadron à cheval et le groupe de canons
de 25 hippomobiles, très éprouvés physiquement, sont placés en réserve au sud d'Alle, à mi-chemin
de la douane belge. D'après le rapport du capitaine Gerdes, le 1er escadron
eut quelques blessés par l'aviation allemande dans la région de Paliseul, et son premier tué à Alle. Une compagnie
du I/295e RI, qui tenait la Semois
avant l'arrivée du 64e GRDI, a des
sections à Alle, Hour et Poupehan, et reste en place.
Le général de Colstoun, dont
le PC est à la Maison Friquet, prescrit
de ne pas faire sauter le pont d'Alle avant
le 12 mai à 4 heures, pour permettre aux éléments en retard de rentrer. Le gué
de Hour saute donc seul, à 21h30. Le pont
d'Alle est barricadé; 1 sergent et 2
sapeurs de la compagnie de sapeurs-mineurs
1/55 sont au poste de mise à feu. A 21 h30, les 2 canons de 25 de l'EDAC, au pont d'Alle,
se replient par ordre; ils seront remplacés à l'aube du 12 mai par les canons
de 25 portés du Groupe.
L'affaire de la passerelle de Mouzaive
D'après les archives du 64e GRDI,
«Vers 23 heures se présentent des
éléments du 11e Cuirassiers qui se sont repliés par la passerelle de Mouzaive. Ils signalent qu'elle n'est
plus tenue par le 2e Spahis Marocains, et que les Allemands sont en train de
l'occuper. Ordre est alors donné au peloton Meyer d'occuper la passerelle. Mais
l'aspirant Meyer ne peut l'atteindre; il est arrêté par des feux venant de
l'autre rive et de la passerelle elle-même. II établit son peloton de façon à
commander par le feu le débouché de la passerelle, et se maintient sur cette
position toute la nuit du 11 au 12 mai. Le cavalier Geslin est tué par une balle
ennemie.»
Les archives du 2e
Régiment de Spahis Marocains nous donnent l'explication (37). Le gros de ce régiment s'est replié par Vresse, sauf le ler
escadron qui devait franchir la Semois à Mouzaive... où les Allemands sont arrivés avant lui.
Tandis que l'escadron se présente, l'ennemi ouvre le feu avec une vingtaine de
mitraillettes. Un brave spahi, avec un FM, gagne alors la rive Sud et fait tête
de pont, puis «tout l'escadron bourre et passe» au prix de 5 tués. Après ce
passage courageux, l'escadron ne pouvait évidemment plus revenir en arrière
pour refouler les Allemands au nord de la Semois
et la passerelle resta donc intacte. Les cuirassiers dont parlent les archives
du 64e GRDI sont passés à Mouzaive avant l'arrivée de l'ennemi, et les
Spahis sont donc, eux, passés après.
(37) A. Bikar: La 3e Brigade deSpahis dans
nos Ardennes. in Revue Belge d'Histoire Militaire, n° de mars 1986, pp. 387 à 401
+ cartes.
4. - LE 12e CHASSEURS À CHEVAL
A minuit et demi le
ravitaillement arrive, ainsi que le lieutenant de La Chapelle (du 3e escadron),
rentrant de permission. A 0h45, la
brigade ordonne au régiment d'envoyer un groupe de combat tenir le carrefour de
Séviscourt, à 7 Km environ au nord-est de
Libramont. Le colonel Lesne désigne pour cette mission le groupe
motocycliste du 15e RDP, reçu en renfort
la veille au soir. A 6 heures, la brigade demande d'envoyer une patrouille
jusqu'à deux Km dans l'Est. Trois cavaliers du 3e escadron sont désignés, et
partent ... on ne les reverra plus. Vers 7h30, on entend des coups de feu loin
dans l'Est; d'après le PC du colonel, le 11e Cuirassiers est au contact.
a) Le combat de Libramont (12e Chasseurs à cheval contre la 2e Panzer)
(1) Au 3e escadron du capitaine Dumas de Champvallier
Le 3e escadron (4 pelotons,
chacun à 2 groupes de combat), renforcé par 1 groupe Mi et 2 canons de 25 du
Se, et le groupe moto du 15e RDP, est
disposé comme suit:
- à gauche, le
peloton Manet entre le chemin de fer et la route
- au ccntre, tenant
la route et le pont, 1 officier du 15e
RDP avec:
- le groupe moto du
15e RDP (envoyé à l'aube an carrefour de
Séviscourt) - l canon de 25
- I peloton, moins 1
de ses 2 groupes
-à droite (à
l'est de la route): le lieutenant de la Chapelle avec 2 pelotons (le sien et
celui de l'adjudant-chef Masset), mais diminués chacun de l'un des 2 groupes;
enfin 1 groupe mi.
- en réserve, au
sud du village: 3 groupes de combat: 1 du peloton sous les ordres d'un officier
du 15e RDP et 2 provenant des pelotons
sous les ordres du lieutenant de la Chapelle; et sans doute le 2e canon de 25
attribué à l'escadron
- PC du capitaine Dumas: près de l'église de Libramont
- défense contre avions (DCA): 2 FM
jumelés, près du PC.
Les chevaux sont sur place, dans les
granges ou garages, et les caves des maisons où des sorties ont été aménagées.
Ajoutons que Libramont avait été organisé par les Belges en centre
de résistance susceptible de se défendre tant face au Sud que face au Nord. En
plus des 4 gros abris formant un arc de cercle face au Sud, appuyé au remblai
du chemin de fer, la protection antichars est assurée au Nord et au Nord-Est par la voie ferrée, à l'Est et au Sud par un
fossé artificiel, et par de solides barricades sur toutes les routes.
En début de matinée
le groupe moto du 15e RDP envoyé vers Séviscourt rentre. Vers 8 heures un petit avion
allemand survole Libramont: il appartient
à l'escadrille d'observation de la 2e Panzer division, qui sera donc fort bien
renseignée. A 8h45, on entend des coups de feu dans la direction prise par la
patrouille à cheval (le brigadier Bodmer et
2 chasseurs du peloton Masset).
Vers 9h30, 1'ennemi arrive en force en vue des positions françaises. C'est la 2e Panzerdivision (38), dont l'objectif du 10 mai était Libramont, et qui fut bloquée à Strainchamps, de 9h30 à 18 heures, par une quarantaine
à peine de courageux Chasseurs ardennais: le peloton Nemry de la 5e compagnie du 1er Chasseurs ardennais,
avec au total 3 FM, 2 Mi, 3 petits lance-grenades et un T. 13 (canon de 47 sur
affût chenillé automoteur). A l'aube du 11 mai, la 2e Panzer reprend sa marche
vers l'Ouest. En tête se trouve le bataillon motocycliste, qui traverse la
route Neufchâteau-Bastogne à Bercheux, et fonce vers Libramont.
(38) Composition de la 2e
Panzerdivision
- 5e groupe de reconnaisance "blindé" (Panzeraufklärungabteilung
ou "PzAA.5"):
56 grosses autos blindées à 8 roues
-
38e groupe antichars "blindé" (Punzerjägerabteilung 38 ou "PzJgA.38): 36 canons
de 37 antichars
-
2e brigade de fusiliers (Schützenbrigade 2 ou "Sch. Brig.2") comprenant:
- le 2e bataillon motocycliste (Kradschützenbataillon 2 ou "Krad3")
-
le 2e régiment de fusiliers (Schützenregiment 2 ou "SR.2"), à 3
bataillons de 5 compagnies, dont 1 de Mi et 1 d'armes lourdes
- 2e brigade de chars (Panzerbrigade 3 ou "Pz. Brig2") comprenant
les régiments de chars 3 et 4 (Panzerregimenten 3 et 4 ou "P/.R.3 et PzR.4"), chacun à 2
bataillons de 3 compagnies
- Artillerieregiment 74 (AR.74)
-
Pionierbataillon 38 (Pi. 38)
- bataillon des transmissions 38 (Nachtrichtcnabtcilung 38
ou Na.38")
- enfin les divers
services habituels.
En arrivant en vue
du chemin de fer, et donc de la position française, les motocyclistes allemands
sont dépassés par les fusiliers portés. Vers 9h30 en effet, le peloton Manet du
3e escadron voit arriver 3 puis 6 camions remplis de fantassins, et des chars
légers. Il semble qu'ils cherchent à passer sur le pont par surprise, mais le
capitaine Dumas n'ose ordonner le sautage, craignant que certains éléments du DSE ne soient encore en avant. Ce qui est le cas mais
ils sont en direction du Nord-Est (route
de Séviscourt et Amberloup), tandis que la 2e Panzer arrive de l'Est (Bercheux). A 10 heures, le feu ennemi s'étend sur
toute la lisière Nord de Libramont, et
jusqu'à la limite Ouest de la position du 3e escadron, mais il est plus faible
à l'est de la route d'Amberloup et nul
devant le pont, dont les Allemands se méfient peut-être, craignant qu'il ne
saute au moment où ils seraient dessus. Le 3e escadron tient ferme.
Tirant au canon, 2
chars légers avancent bientôt vers la voie ferrée, à l'est de la route. Appuyés
par une base de feu puissante, les fusiliers feldgrau montent une attaque à
pied, très fluide, de la valeur d'une compagnie. Des chars leur servent de base
de feu mobile. Le remblai du chemin de fer les protège des feux français venant
de l'Ouest, et un petit bois, de ceux venant de l'Est. Toutefois un FM
particulièrement bien placé, servi par le brigadier Sarrasin, prend d'enfilade
les assaillants, dont plusieurs tombent à chaque rafale. Les Allemands
progressent par bonds individuels, en ligne d'escouades, à grande distance. En
quelques minutes, une quinzaine semble-t-il sont hors de combat. Le capitaine Dumas envoie un des trois groupes de réserve, celui du
brigadier-chef Sorel, en renfort au
peloton attaqué. L'action de Sorel et de
ses chasseurs a un effet décisif: l'ennemi abandonne l'attaque sur ce point.
A 10h30,
les Allemands commencent à se montrer près du pont, mais n'insistent pas.
Quelle est la situation vers 11 heures?
- à l'ouest de la
route, au peloton Manet, tout va bien: l'ennemi ne progresse pas;
- à la route d'Amberloup: rien à signaler;
- à l'est de la
route, le lieutenant de la Chapelle et ses chasseurs sont toujours soumis à un
feu violent de l'ennemi parvenu à la lisière Nord de Libramont; mais les chars, gênés par la voie ferrée,
ne progressent plus;
- à l'extrême
droite, au peloton Masset, cela va moins bien: l'ennemi est presque arrivé au
remblai du chemin de fer. Le groupe de combat du maréchal des logis Guignard «a
supporté le poids le plus dur du combat. Débordé, puis séparé du reste de
l'escadron, sa résistance a été extrêmement brillante»;
- les deux mitrailleuses du lieutenant de la Chapelle
ont repéré le poste d'observation des mortiers allemands, et viennent de le
détruire; elles se préparent à intervenir plus à l'Est, au profil du peloton
Masset.
A 11h30 l'attaque ennemie sur la partie droite du 3e
escadron est arrêtée, mais une dizaine d'Allemands sont parvenus au remblai du
chemin de fer et de là, abrités dans l'angle mort, ils lancent des grenades.
Une nouvelle attaque en direction du ponceau détruit se dessine. Un second
groupe de combat de réserve du 3e escadron y est envoyé en renfort. Le
capitaine Dumas demande un tir
d'artillerie, mais il ne sera pas donné suite à cette demande, pas plus qu'aux
précédentes. Le chasseur Quemion, motocycliste
de liaison est tué. Alors, on enverra chaque fois un cavalier au galop. A midi,
comme déjà dit plus haut, les deux dernières AMR françaises, venant du Nord, repassent le pont de Libramont, que le capitaine Dumas fait alors sauter. Les Allemands étendent leurs
attaques vers les 2e et 4e escadrons. A midi et demi, on constate que l'ennemi
ne cherche plus à progresser à pied, mais il ne diminue pas son tir d'armes
automatiques. Le tir des mortiers a cessé mais celui de pièces de 105
continue. L'avion d'observation est revenu. Deux chars se sont portés vers
l'Est, et six autres sont visibles dans la partie Nord de Libramont, au nord de la voie ferrée. Une AMR française intervient: pour faire du volume, elle tire
dans les fenêtres du ler étage des
maisons situées au-delà du chemin de fer.
(2) Au 2e escadron (d'après le rapport du
capitaine Ethuin)
De l'Ouest vers
l'Est, le long du chemin de fer, il y a les pelotons Bazaille, Dorange, et Baijot (+ 1 groupe de Mi). Comme il n'y a aucune route importante en
front, le canon de 25 est placé à droite, à la route de Neufchâteau. Le PC de l'escadron et le peloton Marsy, gardé en réserve, sont à Lamouline. Vers 8 heures les premiers ennemis sont
aperçus: ce sont quelques motocyclistes, devant le peloton Bazaille. On tire, puis le feu s'étend vers le 3e
escadron. Mais ensuite on voit des fantassins ennemis progresser vers le
peloton Bazaille, qui les arrête à
quelques centaines de mètres de la voie ferrée. Le lieutenant de Fombelle, du 5e escadron (de Mi et canons), arrive au
PC et se met à la disposition du capitaine Ethuin,
qui le charge de reconnaître un itinéraire de repli plein Sud, à travers bois.
Tandis que l'escadron Dumas de Champvallier et le peloton de gauche (Bazaille) de l'escadron Ethuin sont fortement accrochés, les pelotons Dorange et Baijot
ne voient devant eux que de faibles éléments à pied, dans les bois. Bazaille est toujours fortement engagé lorsque la
droite du 3e escadron (peloton Masset) décroche de la voie ferrée. Au même
moment le capitaine Ethuin reçoit l'ordre
de repli. Celui-ci s'effectue dans l'ordre: Baijot,
le groupe Mi, Dorange, Bazaille, le canon
de 25, Marsy. Le brigadier Lamblin est tombé; on ne sait s'il est tué ou blessé.
b) Le repli du 12e Chasseurs à cheval
L'ennemi ayant percé
à Neufchâteau et progressant en masse
vers l'Ouest, le colonel Lesne reçoit à
13 heures l'ordre de se reporter, par échelons, sur la Semois, où le régiment occupera une position au nord
de La Chapelle. Le mouvement s'avérera difficile, car les Allemands occupent
déjà Bertrix, et lancent leurs chars pour
couper les routes de repli des Français.
(1) Le 2e escadron
Le 2e escadron a décroché en premier lieu.
Il a rencontré le lieutenant Beau et son escadron de cuirassiers, mais ceux-ci
ne l'ont pas suivi. Au moment où il aborde la route de Fays-les-Veneurs, il rencontre le capitaine Ribes (du DSE), qui
est là avec le sous-lieutenant
Brosse-Duplan, 2 AMR, et des
motocyclistes, et qui l'informe de la situation. L'escadron arrive en formation
diluée à Faysles-Veneurs, où l'ennemi
venu de Neufchâteau se trouve déjà et le
coupe en deux:
- le capitaine Ethuin et 2 pelotons qui ont traversé le village iront
passer la Semois à Bouillon, puis se
dirigeront vers l'emplacement qui leur est assigné: Beaubru (2 Km au sud-est de Bouillon).
- le lieutenant Dorange,
avec les deux autres pelotons, se jette dans les bois vers l'Ouest, traverse la
route Bouillon-Rochefort à Paliseul, puis pique vers le Sud, passe la Semois à Poupehan,
et rejoint le capitaine à Beaubru en fin
de journée.
(2) Le 3e escadron
Le 3e escadron décroche sans trop de
difficultés, dans l'ordre: peloton Manet, peloton de commandement, canon de 25,
groupe Mi, peloton Masset, peloton de la Chapelle. Mais au cours de l'opération
le chasseur Durosay est tué à cheval.
Vers 14 heures l'escadron achève de passer à Recogne, et dépasse le 1er escadron resté la veille à la cote 495 et
chargé maintenant de couvrir le repli du 3e. Au 3e on fait l'appel, et dresse
le bilan du combat de Libramont:
- les pelotons Manet et Rohart sont complets
- au peloton de la
Chapelle il y a 2 blessés
- au peloton Masset il y a
4 tués, 7 blessés, et 2 disparus: les chasseurs partis le matin avec le
brigadier Bodmer, «envoyé en patrouille
le 11 mai, à cheval, est débordé par des éléments motorisés. A signalé
l'arrivée de l'ennemi. Tué en accomplissant sa mission».
- au peloton de
commandement il y a 2 tués, 9 chevaux sont tués, blessés grièvement ou
disparus; 2 side-cars (du groupe moto du 15e RDP) sont détruits ainsi qu'un FM (par bombe d'avion).
Le 3e escadron, suivi du 1 er, se hâte vers Fays-les-Veneurs. A 15h30, un sous-officier
motocycliste du 15e RDP arrive de la
direction de Bouillon et prévient le capitaine Dumas de Champvallier que
l'ennemi, avec des chars et des motocyclistes, tient la route Libramont-Bouillon au passage à niveau de la voie
ferrée Paliseul-Bertrix, c'est-à-dire à
environ 5 kilomètres avant Fays-les-Veneurs.
Le 3e escadron continue au trot. Plusieurs pelotons de cuirassiers, déviés vers
l'Ouest devant la marée feldgrau, sont devant lui. A 16h30, à 2 kilomètres
environ avant le passage à niveau, les cuirassiers s'arrêtent et un de leurs
officiers prévient les chasseurs à cheval qu'une reconnaissance envoyée par lui
au passage à niveau en question, s'y est heurtée à des chars et motocyclistes
ennemis, et a appris que Fays-les-Veneurs
est fortement tenu. Le capitaine Dumas décide
alors de faire un détour par le Nord-Ouest,
en passant par Assenois et Offagne. L'escadron, survolé par des avions, commence
son mouvement, couvert par des patrouilles fournies par le peloton Manet. Vers
17 heures, les cavaliers sont attaqués à la mitrailleuse par des avions les
survolant en rase-mottes. L'escadron se
jette dans les bois au sud de la route Assenois-Offagne.
Les cavaliers progressent de bois en bois, peloton par peloton, au galop.
Jusqu'à 21 heures les avions seront toujours présents, soit trois, soit deux,
parfois un seul, observant tous les mouvements. Vers 18 heures le 3e escadron
est dans un bois situé à environ un kilomètre à l'ouest de Fays-les-Veneurs. Le peloton Manet et quelques
mitrailleurs mettent pied à terre. Manet et quelques chasseurs pénètrent dans Fays-les-Veneurs, en reconnaissance. Les autos-mitrailleuses et motocyclistes ennemis les
laissent entrer dans la localité, puis tirent. Le cheval porte-FM est tué, mais les cavaliers sont indemnes et
se replient.
Le 1er escadron
arrive et se joint au 3e. Le capitaine Dumas
décide de retraiter par Jehonville, Sart,
Opont, Naomé, Oizy, et Vresse, en faisant
mouvement en dehors des routes, et si possible sans entrer dans les localités.
A 18h40, en sortant
des bois, les chasseurs à cheval voient arriver l'escadron Grognet du 11 e Cuirassiers, dévié lui aussi comme
l'escadron Beau, et se dirigeant vers Fays-les-Veneurs.
On le renseigne sur l'ennemi. Vers 19 heures, à Sart, les avions allemands reviennent et obligent 1er ler et 3e escadrons à continuer leur mouvement au
galop, entre les bois. Naomé est atteint
vers 20 heures, le peloton Manet toujours en avant. A 20h15 arrive de la région
de Neufchâteau un détachement de 4 AMR et 6 side-cars, avec un officier du 15e RDP, qui se met aux ordres du capitaine Dumas. Les motorisés sont les bienvenus, et se
répartissent en 3 patrouilles: une à l'avant-garde, sous les ordres du
lieutenant Manet; une à l'arrière-garde, sous les ordres du lieutenant de la
Chapelle; une en couverture sur le flanc dangereux (l'Est), sous les ordres de
l'officier du 15e RDP, ira tenir les
principaux carrefours avant l'arrivée du gros des 2 escadrons.
Vers 20h30, il y a
un arrêt d'environ 20 minutes à Oizy à
cause de l'aviation ennemie. Plusieurs groupes de combat des chasseurs, à pied,
tirent au fusil sur les avions. Un chasseur de la fraction du Se escadron en
renfort au 3e, est tué, et 2 chevaux sont blessés. A 21 heures le capitaine Dumas, resté au carrefour à un kilomètre au sud d'Oizy, pour contrôler le passage du détachement,
s'aperçoit que le ler escadron ne suitplus. Au carrefour des routes Oizy/Vresse et GrosFays/Six
Planes, le chasseur Lemaire signale une dizaine d'autos-mitrailleuses ennemies en direction de Gros-Fays. Il semble y avoir deux groupes de
véhicules: l'un de 6 ou 7 autos-mitrailleuses,
l'autre d'une douzaine de chars légers. De loin les Allemands ouvrent le feu et
se lancent à toute vitesse vers le carrefour, tandis que les cavaliers français
prennent le galop. Seuls le peloton Manet et le peloton de commandement passent
et foncent sur Vresse; les autres
pelotons se jettent dans les bois au nord de la route Oizy-Vresse. Les deux premiers pelotons franchissent
la Semois vers 22 heures près de Vresse, à gué. Les pelotons Robart, Masset, de la Chapelle, avec les Mi et un
canon de 25 passent la rivière vers 23 heures. Le 3e escadron se regroupe le 12
mai vers 4 heures du matin à Charleville.
Au cours du repli de Libramont il a perdu
1 tué, 5 disparus, et a eu 6 blessés; 10 chevaux sont perdus ou hors de
service.
(3) Le 1er escadron
Quant au 1er escadron, il arrive aussi à Charleville, après avoir passé la Semois aux Hautes Rivières (nord-ouest de Bohan). Les deux escadrons (1er et 3e) rejoindront leur régiment le 13 mai.
(4) Le 4e escadron
Cet escadron se
replie sur Corbion par Ochamps, Jehonville et Offagne. Les 2 pelotons à cheval sont en tête, et arriveront sans
incident à Bouillon et Beaubru. Les 2
pelotons cyclistes sont laissés en arrière à Ochamps pour tenir le village jusqu'à l'arrivée du DSE, mais celui-ci ne revient pas par cet axe. A 15
heures les deux pelotons sont violemment attaqués. Le sous-lieutenant La Salle,
pour les sauver de l'encerclement, les renvoie sous les ordres du maréchal des logis-chef Morandeau. Lui-même prend un FM et, avec
quelques chasseurs, se bat héroïquement. Sur le point d'être capturé, il
réussit à gagner les bois ... mais il sera fait prisonnier 4 jours plus tard à
La Chapelle (entre Bouillon et Sedan).
Quant à Morandeau avec les deux pelotons cyclistes, ils se
heurtent à l'ennemi près de Mouzaive ... La moitié environ des cyclistes parviendront à
rejoindre leur escadron deux jours plus tard.
c) Le 12e Chasseurs à cheval à la Semois
Le 12e Chasseurs à
cheval, le soir du 11 mai, est donc réduit au 2e escadron, aux deux pelotons à
cheval du 4e et à quelques fractions du 5e. Vers 19 heures il est établi sur la
ligne Corbion-sortie Sud de Bouillon-Beaubru. Les deux compagnies du I/295e RI, qui étaient sur place, sont incorporées
dans le sysfème de défense. Le PC régimentaire est à la ferme des
Quatre Vents.
Le PC du général de Colstoun, commandant le Groupement Ouest, s'établit le
soir à la Maison Friqnet.
II. - AU GROUPEMENT EST
1. - LES DÉTACHEMENTS AVANCÉS FRANÇAIS
Comme nous l'avons
dit plus haut, il y avait le soir du 10 mai, devant le Groupement Est, deux
détachement avancés, que nous
appellerons du nom de leurs chefs: les capitaines Fontant et de Chabot.
a) Le Détachement Fontant (commandant du 1er- Esc/15e RDP)
Ce détachement comprend:
- l'ex DD.2 du
capitaine de Canchy (Comd du 2e/5e RAM):
- 1 peloton de 4 AMD du 1er/5e RAM
- 1 peloton moto
(Toussaint) du 2e/5e RAM
- l'ex-DSF.: 2
pelotons de 3 AMR et 2 pelotons moto
(chacun à une quinzaine de side-cars avec
deux dragons) du 1er/15e RDP, constituant
2 groupements mixtes d'AMR et motos:
- celui du
capitaine Fontant, avec le
sous-lieutenant Combet
- celui des lieutenants Glasberg et Isaac.
- le peloton de 3 chars Hotchkiss (du
3e/5e RAM) de l'aspirant Guignard.
Où ce détachement passe-t-il la nuit du 10
au 11 mai?
- Fontant à
Bercheux, avec l'ex DD.2 (de Canchy et Toussaint) et une fraction de l'ex DSE
(Combet)
- Glasberg et Isaac
à Lescheret
- Guignard et ses 3
chars un peu en arrière de Fontant, sur la route de Neufchâteau.
b) Le Détachement de Chabot (commandant du 4e Esc moto/5e RAM)
Ce détachement, ex-DD/DSE du sous-groupement
Sud du Groupement Est, comprend:
- 2 pelotons
motocyclistes (Baudouin et Koltz) du 4e/Se RAM
- 1 peloton
antichars (4 canons de 25) du Se EDAC
Il s'installe pour la nuit à Wittimont.
2. - LES ALLEMANDS
C'est la 1ère Panzer qui va attaquer Neufchâteau et le Groupement Est de la 5e DLC, mais à Bercheux,
contre le gros du détachement Fontant, c'est
la 2e Panzer.
a) La 2e Panzer
Comme dit plus haut,
la 2e Panzer a été arrêtée le 10 mai par le peloton de Chasseurs ardennais de Strainchamps. Le 11 mai, pour aller attaquer le
Groupement Ouest de la 5e DLC à Libramont, elle devra donc prendre la direction du Nord-Ouest et traverser la route Neufchâteau-Bastogne aux environs de Bercheux. C'est le bataillon motocycliste de la
division qui est en tête. II est guidé par un des 12 avions Henschel de l'escadrille d'observation divisionnaire.
Régulièrement, le pilote lance un tube enveloppé de tissu jaune, bien visible,
et qu'on repère et trouve facilement au sol. Le message qu'il renferme donne de
précieuses indications sur l'itinéraire (barricade, côté où le contournement
est possible, etc) alors que les Français
hélas! sont quasi aveugles, faute d'aviation. Dès 4h30 cette tête de la 2e
Panzer bouscule à Petite-Rosière et à Bercheux le capitaine Fontant, et ensuite ira attaquer le Groupement Ouest de la 5e DLC, comme décrit plus haut.
b) La 1ère Panzer
La 1ère Panzer va foncer en direction générale de Neufchâteau. Le 10 mai, pour attaquer les positions
des Chasseurs ardennais de Martelange et Bodange, défendant la vallée très encaissée de la
Sûre, elle a mis en oeuvre sa brigade
de fusiliers et son bataillon motocycliste. Le soir, ces éléments
cantonnaient dans la région Fauvillers-Bodange
sous la protection de «sûretés» établies sur la ligne Volaiville-Witry. De Fauvillers à Neufchâteau le
terrain est beaucoup plus facile, et aucune position organisée belge ou
française ne s'y trouve avant Neufchâteau.
Aussi, le 11 mai, le général Kirchner, commandant la 1ère Panzer, va-t-il lancer ses chars en avant. Dans son
ordre émis le soir du 10, pour la journée du 11, Kirchner prescrivait à sa
Panzerbrigade (Panzerregimenter ou «PzR» 1
et 2) d'atteindre dans la nuit du 10 au 11 la région d'Ebly, afin de pouvoir, le 11, attaquer en direction
des passages de la Semois à Rochehaut et Bouillon en contournant Neufchâteau, - considéré
comme un point fort -, par le Sud, c'est-à-dire par Hamipré. Mais le pont de Bodange n'a été utilisable qu'à 20h15, et ce n'est que
le 11 mai à 6h30 que le PzR.2, régiment
de tête de la brigade de chars, après une halte à Traimont où les chars de la compagnie de tête ont
ouvert le feu sur des Français du détachement de Chabot, atteint les bois à l'est de Namoussart,
et se prépare à l'attaque. A ce moment-là le PzR.l n'est encore qu'au pont de Bodange.
Chacun des PzR. l et 2 comprenait 2 bataillons de 3 compagnies de
chars (1 de chars moyens, et 2 de chars légers). D'après les historiens de la lre Panzer (39), le 10
mai 19401e PzR.l comptait au total 139
chars, dont 28 «Panzer IV» et 32 «Panzer III») (40).
(39) Rolf Stoves: Die 1. Panzer-Division 1935-1945 (Verlag Podzun,
Bad Nauheim, 1961) et Ch. von Lucke: Die Geschichte des Panzer-Regiment 2 (Boss-Drick und Verlag, Kleve, 1953).
(40) Les chars
allemands de 1940 étaient de 4 types: type I: 2 Mi; II: I canon de 20 mm; III:
1 canon de 37; IV: 1 canon de 75.
A 8h30, le PzR.2 passe à l'attaque, ses 139 chars étant répartis
en deux vagues. En plus des 28 canons de 75 des chars du type Panzer IV, les
chars sont appuyés par les 12 obusiers de 105 du Ier groupe du 73e régiment d'artillerie. Cela fait 40 pièces d'artillerie
... en plus des petits canons de 37 et 20 mm et des mitrailleuses des chars
légers ... Le PzR.2 attaque sur un front
étroit, au sud de Hamipré, où les
Français possèdent en tout six petits canons de 25 mm: 2 à l'escadron Grognet (2e du 11e Cuirassiers, sur les 4 que
possède le régiment), et 4 (du 5e EDAC) au
détachement de Chabot.
A 9h30 1e PzR.2 traverse le chemin de fer Namur-Arlon et la route Neufchâteau-Rossignol, au sud de Hamipré, puis atteint Montplainchamps. A ce moment-là le PzR.l
est encore loin en arrière. Nous verrons la suite plus loin.
3. - LES ÉVÉNEMENTS AU DÉTACHEMENT FONTANT
Dès l'aube du 11 mai
le lieutenant Glasberg, qui a passé la nuit à Lescheret, pousse quelques reconnaissances vers l'Est. Rien à signaler.
Mais il n'en va pas de même dans la région de Bercheux. A peine après avoir quitté le village, vers 3 heures du
matin, pour aller à la découverte dans la direction de l'ennemi, le capitaine Fontant est arrêté à hauteur de Petite-Rosière par le feu de chars, appuyés par de l'infanterie
et des motocyclistes. A 4h30, Fontant inscrit
ce renseignement sur un message qu'il envoie par l'estafette motocycliste au PC
du colonel Labouche, à Petitvoir. Le lieutenant Toussaint et ses AMD reçoivent mission de faire du combat retardateur, et
de se replier par bonds. Un message est envoyé au lieutenant Glasberg, à Lescheret: «Me replie sur Neufchâteau; pour vous liberté de manoeuvre; concentration à Longlier». Fontant et Toussaint se replient lentement.
Ils font tellement de volume qu'à 6 heures l'artillerie allemande intervient:
elle tire sur Bercheux. A ce moment-là
les Français sont à environ 1 kilomètre à l'est de Molinfaing.
A 7 heures, à son PC
de Petitvoir, le colonel Labouche reçoit le message de 4h30 du capitaine Fontant. Il donne aussitôt l'ordre de faire rentrer le
détachement dans les lignes (donc en deça
de Neufchâteau), «afin de permettre
éventuellement l'action du groupe d'obusiers de 105 installé à Petitvoir». Fontant se replie donc, mais très
lentement: à 10 heures il sera encore à Longlier.
Et le peloton de chars de l'aspirant Guignard? Le maréchal des logis-chef Gouya écrit: «A l'aube, nous sommes
attaqués; nous nous battons en nous repliant sur Neufchâteau, où mon peloton arrive vers midi».
Entre-temps, qu'a
fait Glasberg? Pour ne pas être débordé à Lescheret,
d'où il n'a aucune vue, il s'est replié d'environ un kilomètre, de manière à se
trouver sur un petit plateau, d'où les vues sont bonnes. Bientôt il reçoit
quelques coups de feu, mais ne voit rien. Et puis voici qu'au loin apparaissent
des chars, avançant très lentement. Glasberg, qui n'a plus aucune liaison avec
les détachements voisins, se replie
lentement vers l'Ouest, par un itinéraire qu'il ne connaît pas puisqu'il était
arrivé à Lescheret en venant de Vaux- lez-Rosière. Il écrit: «Ma route de repli est barrée
par de gros troncs d'arbres; par qui ont été établies ces barricades? Je suis
obligé de chercher un chemin de repli à travers la forêt». Ce sont évidemment
les Belges qui ont réalisé ces abattis, mais Glasberg n'a vu aucun Chasseur
ardennais ou soldat belge du génie, et ignore évidemment que les routes et
chemins autres que leurs itinéraires de repli (en direction générale du Nord-Ouest) ont été obstrués dès la seconde partie de
la nuit du 10 au 11 mai, après l'alerte. Ce n'est qu'après plusieurs essais
infructueux que Glasberg parvient à se dégager avec ses AMR et motos, et arrive vers 10 heures près de la voie
ferrée, à un kilomètre environ au sud de Longlier.
Là, sur la route Longlier-Offaing, il
établit une barricade, et pose des mines. La liaison est reprise avec le
capitaine Fontant, qui regroupe tout son
détachement à Neufchâteau. Il est environ
midi. Les véhicules font le plein d'essence. Les trois chars du peloton
Guignard reçoivent l'ordre de se rendre au bois de Petitvoir, pour assurer la défense du PC du colonel Evain. Fontant met Glasberg en surveillance au sud de Neufchâteau, et Combet
aux lisières Sud-Ouest. Bientôt Glasberg
voit des chars allemands apparaître sur une crête, en direction du Sud-Ouest, et Combet
rapporte que des chars s'infiltrent en direction de l'Ouest. La seule route de
repli paraissant libre est celle du Nord, vers Libramont. Le capitaine Fontant donne
à Glasberg l'ordre de se porter à Tournay
avec son détachement, ainsi que les 3 chars Hotchkiss
de l'aspirant Guignard. II faut tenir les routes, pour permettre le repli des
autres éléments de la division, et couvrir la retraite. Le détachement Fontant quitte Tournay
vers 15h30. Nous verrons plus loin ce qu'il devient ensuite.
4. - LE DÉTACHEMENT DE CHABOT
A l'aube du 11 mai,
le capitaine de Chabot décide, puisqu'il
ne peut plus déboucher de Wittimont à
cause des barricades, d'aller retrouver son axe à Bombois, en faisant un crochet par l'arrière, c'est à-dire par Bernimont,
Offaing et Mon Idée. Le détachement démarre dès 3h30, et un peu plus tard
atteint Offaing, où il livre aux
cuirassiers le Feldwebel capturé la veille au soir. Et la progression du
détachement continue vers l'Est. Le peloton Baudouin est en tête. Après Bombois il arrive devant Traimont. Le maréchal des logis Jaick aperçoit dans le village des chars ennemis.
Baudouin en compte jusqu'à 32. Les Français sont survolés par un petit avion
espion, un Henschel sans doute de
l'escadrille d'observation de la 1ère Panzer, qui lance 2 fusées blanches pour
avertir ses compatriotes. Il est 8 heures. Etant
seul en avant en observation, Baudouin reçoit une salve d'obus; il donne
l'ordre de repli, et rend compte au capitaine.
Tandis que le
détachement de Chabot se replie par
échelons, Koltz et 4 motocyclistes ont
mis pied à terre et placent des mines; mais, soumis au feu ennemi et débordés,
ils sont obligés, après quelques minutes, de se jeter dans le bois. Le brave Koltz, blessé, retraite péniblement à travers les
forêts, mais sera fait prisonnier le 15 mai à Villers-devant-Orval.
Le détachement de Chabot parvient à franchir le pont d'Hamipré, détruit, et se regroupe au Sart, où il s'installe en défensive face à l'Est. Le
capitaine, averti vers 9h30 du repli de l'échelon à cheval (II/11e Cuirassiers
et I/60e GRDI), conformément aux ordres,
sur la ligne Neufchâteau-Straimont, avertit
les cavaliers de l'arrivée de blindés ennemis.
Vers 10h30 les chars allemands passent à l'attaque, et le
détachement français est la cible de plusieurs obus. Il reçoit l'ordre de se
replier sur Nolinfaing, où le même
scénario se reproduit: installation en défensive, et aussitôt attaque de chars.
Le détachement se replie sur Montplainchamps
et Grapfontaine, où il rejoint les
éléments motorisés du 60e GRDI, en repli
aussi. Sur ordre du colonel du Passage, le détachement de Chabot fait l'arrière-garde de la colonne du 60e GRDI en repli sur Saint-Médard,
par Martilly. Dans cette dernière
localité, le détachement de Chabot s'installe
défensivement sur la Vierre, avec le IIe groupe
du 11e Cuirassiers.
Les Français sont
attaqués par des avions volant bas. Vers 18h30 le 2e groupe (du brigadier-chef Haddard) du peloton Baudouin est mis à la disposition
du 3e escadron (Mi et engins) du 60e GRDI,
et occupe les sorties Est et Sud de Saint-Médard.
Le groupe du maréchal des logis Branquet reçoit
pour mission de chercher la liaison avec le Ier
bataillon du 15e RDP, à Bertrix. Un peu après 18h30 1e détachement de Chabot reçoit l'ordre de se replier sur la Semois, et quitte Martilly.
Il va franchir la Semois à Martué, puis cantonne à Fontenoille.
5. - LES ÉVÉNEMENTS DANS LE QUADRILATÈRE NEUFCHÂTEAU-LES FOSSÉS - SUXY-STRAIMONT
a) Le dispositif français à l'aube du 11 mai: 3 escadrons hippomobiles sur- la
ligne Neufchâteau-Les Fossés.
(1) L'escadron Grognet (2e/11e Cuirassiers)
C'est l'escadron Grognet qui est chargé de la défense de Neufchâteau. Il s'est organisé comme suit:
- au Nord-est, le
peloton Thomas, avec 1 canon de 25 défendant la route de Longlier;
- au Sud-est le peloton Elie de Rothschild, avec 1 canon de 25 battant la route de Hamipré;
- au centre, dans Neufchâteau: les pelotons Meaudre et Venturini,
dressant des barricades et organisant la défense de la ville;
- PC du capitaine Grognet: à la sortie Sud-ouest de Neufchâteau.
Remarques:
- le PC de Grognet
est jumelé avec celui du capitaine Finaz, commandant du I/11e Cuirassiers (2e
escadron Grognet, et 1er du capitaine Beau, voisin de gauche du 2e, à Tournay);
- le PC du colonel Labouche,
Comd le 11e Cuirassiers, est à Petitvoir.
Le capitaine Grognet écrit dans son rapport que sa mission était
d'empêcher le franchissement de la voie ferrée par l'ennemi pendant 2 à 3
jours, selon des instructions verbales qui lui furent données le 11 mai par le
colonel, et confirmées à 8h30 par le lieutenant Leaute, officier de renseignements du régiment, et à 10 heures par le
capitaine Finaz.
(2) L'escadron
Pillafort (3e du 11e Cuirassiers)
L'escadron Pillafort défend la voie ferrée Namur-Arlon au sud de l'escadron Grognet, jusqu'à «Les Vignes». Il dispose d'un canon
de 25 de l'escadron régimentaire d'engins.
(3) L'escadron André (1er du 60e GRDI)
L'escadron André est
au sud de celui de Pillafort, jusqu'à
«Les Fossés».
(4) Sur la bretelle Neufchâteau-Straimont (exclu)
Sur cette bretelle il
y a les escadrons motorisés (2e et 3e) du 60e GRDI; ils ne disposent d'aucune arme antichars. Sur cette bretelle ou
un peu en arrière il y a aussi le 4e escadron du 11e Cuirassiers, en réserve.
Rappelons-nous
l'ordre du général Chanoine, le 11 mai à 4h45: vu la tournure des événements le
10 mai à la 2e DLC, la Ire Brigade de
cavalerie (1ère BC: l er Hussards et 8e Chasseurs à cheval), qui se trouve
entre les 2e et 5e DLC, doit étendre sa
gauche jusqu'à Straimont inclus, tandis
qu'à la 5e DLC, la droite (II/11e Cuirassiers et 1er/60e GRDI) doit se replier sur la bretelle Neufchâteau-Straimont (ex). De ce fait, à Neufchâteau,
l'escadron Grognet devra forcément
adapter sa droite, c'est-à-dire la reculer, pour rester en liaison avec la
gauche de la nouvelle position de Pillafort.
b) Les événements du 11 mai
Après le franchissement, vers 9h30, du
chemin de fer et de la route de Rossignol, au sud de Hamipré, les chars de la 1ère Panzer progressent vers Petitvoir. Les unités françaises sont donc tronçonnées
en trois fractions:
- à Neufchâteau, l'escadron Grognet et le détachement
Fontant et sans doute aussi le 4e/11e Cuirassiers:
- vers Nolinfaing-Montplainchamps-Grapfontaine: le
détachement de Chabot, et les éléments
motorisés du 60e GRDI;
- en repli vers
Straimont, via Suxy: les escadrons à cheval Pillafort (3e/11e Cuirassiers) et
André (1er/60e GRDI.
(1) Les
événements à Neufchâteau
D'après le capitaine
Finaz, commandant le I/11e Cuirassiers, une première attaque de chars a
lieu vers 7 heures, au sud de la route Neufchâteau-Longlier;
5 chars sont atteints par le canon de 25 du peloton Thomas, et l'attaque est
brisée. D'après Gounelle (41), «le
tireur FM Provost réussit à toucher un
gros avion Dornier, qui s'abat en
flammes».
(41) Gounelle: Sedan, p. 90.
En face de Hamipré
le premier contact est pris à 8h30 par le peloton Rothschild. Gounelle écrit (42)
que les cuirassiers du lieutenant Elie de
Rothschild, «réussissent à détruire 4 chars et 6 sidecars. Devant la barricade érigée à la sortie de Hamipré, 3 véhicules ennemis furent arrêtés par un
canon de 25 de l'escadron Seguin (Ndlr:
5e/11e Cuir.), servi par le brigadier Chicot, le tireur Andreaux et le chargeur Thévenet, sous les ordres du maréchal des logis Michelon». Mais le peloton français est menacé sur son
flanc droit par le repli, vers la même heure, de l'escadron Pillafort, conformément aux ordres rappelés plus haut.
Le capitaine Grognet, vers 10h30, fait reculer Rothschild, qui s'installe sur une
nouvelle position aux lisières Sud de Neufchâteau.
Il y est renforcé par le peloton Meaudre.
Sur ordre des Français, le lieutenant belge Fairon
fait sauter les destructions Nf. 6, à
8h35, ainsi que Nf. 1 et 2, à 10h40. Une patrouille d'AMR et motos du détachement Fontant
va et vient sur la route Neufchâteau-Warmifontaine.
(42) Gounelle: Sedan, p. 89.
Les mouvements des
chars ennemis menacent de plus en plus la droite de l'escadron Grognet. A 11h20, un motocycliste envoyé à Petitvoir au PC du colonel Labouche revient: il n'a pu passer, il signale que ce
PC est en flammes, et que les chars allemands sont dans le village. Le
lieutenant Leaute, officier de
renseignements du Corps, se trouvant à Neufchâteau,
essaie d'aller à Petitvoir derrière une
patrouille d'AMR et motos; il revient:
impossible de passer. Alors, à 11h45, le capitaine Finaz décide le repli sur Tournay. Le capitaine Fontant fait faire une reconnaissance sur Fineuse et Grandvoir,
et assure la protection de l'escadron Grognet.
Tous les éléments parviennent à Tournay, où
se trouve toujours l'escadron du capitaine Beau (ler/11e Cuir.).
(2) Vers Nolinfaing-Montplainchamps-Grapfontaine
Les 2e et 3e
escadrons motorisés du 60e GRDI étaient
initialement déployés sur la bretelle Neufchâteau-Straimont.
A Straimont, il y avait un peloton moto
du 2e, un peloton de Mi du 3e, et 2 canons de 25 de l'EDAC. Ces éléments de Straimont se replient vers les gros de leurs unités, plus au Nord, vers
8 heures, c'est-à-dire dès l'arrivée à Straimont
du 2e escadron du l er Hussards (de la 1ère BC), conformément aux ordres
prescrivant à la Ire BC d'étendre sa gauche jusqu'à cette localité.
Dès que le
détachement de Chabot les rejoint, et
qu'apparaissent une quarantaine de chars ennemis, les 2e et 3e escadrons du 60e
GRDI se replient sur la 2e position
française Gribomont/Saint-Médard, où se
trouve le Ier bataillon du 15e RDP. Le détachement de Chabot, comme dit plus haut, fait l'arrière-garde.
Et le 4e escadron du 11e Cuirassiers? Les archives ne
disent de lui que quelques mots:
- initialement en
réserve (derrière l'escadron Grognet ou l'escadron Pillafort?);
- «il exécute le
mouvement (de repli vers la position Gribomont/Saint-Médard) sans difficulté»;
- le soir du 12 mai
il est encore «à peu près complet».
Il est donc quasi certain que cet escadron
aura retraité en même temps que les 2e et 3e du 60e GRDI.
(3) En
repli vers Straimont, via Suxy: les escadrons Pillafort et André.
D'après les archives
du 60e GRDI, l'escadron du capitaine
André ne se décroche que péniblement, en présence des chars allemands. Trouvant
Suxy déjà occupé par l'ennemi, il attaque
pour s'ouvrir le passage, aidé par l'escadron Pillafort. Mais il échoue. «De l'escadron André, aucun élément n'est
revenu; on sait seulement qu'il a été détruit à Suxy après s'être énergiquement battu».
Le capitaine Pillafort a heureusement fait un rapport plus complet
des événements. L'escadron André ayant du retard, il l'attend un moment à Assenois, puis, ne le voyant pas arriver (car,
attaqué, André n'a pas pu emprunter l'itinéraire prévu), et apercevant une
trentaine de chars entamant un mouvement vers le Sud, et ouvrant le feu à 2.000
mètres, il démarre et entre dans le bois touffu situé au sud du village.
L'escadron Pillafort traverse une
clairière sous le feu de chars arrivés à environ 600 mètres. Une centaine de
vaches sont tuées... sans qu'un seul cuirassier soit touché. Mais l'unique
canon de 25 s'est trompé de route, et dès ce moment est considéré comme perdu.
L'escadron se regroupe. Pour arriver à Straimont
il est nécessaire de passer par Suxy. En
route donc vers Suxy. A la sortie des
bois, Pillafort trouve quelques éléments
de l'escadron André, avec les lieutenants Delisée
et Laguette. Il prend le commandement de
tous ces cavaliers, et donne ses ordres:
- le
sous-lieutenant de Saint-Mathieu (du 3e/11e Cuirassiers), avec 2 pelotons, ira
occuper la crête dominant Suxy;
- le lieutenant
Laguette et son peloton (du 1er/60e GRDI) déborderont Suxy par la gauche;
- le peloton Delisée (du 1er/60e GRDI) cherchera une
position pour couvrir les mouvements par ses feux.
Les deux pelotons de
cuirassiers gagnent la crête à hauteur d'une petite chapelle située sur le côté
droit de la route descendant du Nord sur Suxy,
à environ 600 mètres au nord du village. Mais ils sont accueillis par un
violent feu ennemi; une fraction du régiment Grossdeutschland, en renfort à la
10e Panzer, occupe en effet déjà Suxy. En
quelques minutes les 4 fusils-mitrailleurs des deux pelotons de cuirassiers
mettent hors de combat les servants d'un canon de 37, en batterie à un angle du
cimetière de Suxy. Mais néanmoins les mouvements
des pelotons Laguette et Delisée sont bloqués par l'ennemi dès leur début. Et
de nouveaux mouvements, cette fois d'une plus grande amplitude, sont tout
autant voués à l'échec. Les Allemands font intervenir plus de 200 hommes,
arrivés sur véhicules blindés. Les pertes chez les Français commencent à
devenir sérieuses: aux pelotons du 1er/60e
GRDI il y a 4 tués (le lieutenant Germain Laguette,
le maréchal des logis Robert Huet et les
cavaliers Gaston Bova et Auguste Quedeville) et un certain nombre de blessés. Chez les
cuirassiers, il y a 3 blessés graves.
Devant l'arrêt des
mouvements de débordement français, les Allemands eux-mêmes entament une double
manceuvre par les ailes, tandis que leurs
mitrailleuses balaient la route du Nord. Le capitaine André, avec le restant de
son escadron, vient rejoindre Pillafort. Ce
dernier lui demande de faire intervenir son mortier de 60 mm pour neutraliser
le canon de 37 ennemis. Mais cette action ne produit aucun résultat. Devant
l'échec total des 2 escadrons français, qui ne parviennent pas à déboucher des
bois, - ce qui n'est pas étonnant, vu le nombre et l'armement des adversaires
-, Pillafort décide de gagner Straimont par les bois. Il parviendra finalement à
rejoindre le gros de la colonne du commandant Le Balle (II/11e Cuirassiers), mais au prix de grosses pertes:
sur les 179 cuirassiers de l'escadron, 42 manquent à l'appel.
III. - LES ALLEMANDS: LA PROGRESSION DES TROIS
DIVISIONS BLINDÉES DANS LE SECTEUR DE LA 5ème DLC, APRÈS LA PERCÉE DE LA POSITION FRANÇAISE DU
CHEMIN DE FER NAMUR-ARLON (TRANSVERSALE
0.3)
Une caractéristique
commune aux trois Panzers en cause, le 11 mai, c'est qu'elles se dirigent
d'abord grosso modo de l'Est vers l'Ouest, avant d'obliquer vers le Sud, en
direction générale de Sedan.
1. - LA 2e PANZER, DANS LE NORD DU SECTEUR
DE LA 5ème DLC
Vers 14 heures, après la prise de Libramont, la 2e Panzer a continué sa progression, en
deux colonnes:
- celle
du Nord, qui doit aller par Ochamps, Anloy, Framont... Elle se compose du groupe
de reconnaissance divisionnaire (Panzeraufklärungabteilung
ou PzAA.5: 56 grosses autos blindées à 8
roues) du régiment de fusiliers n° 2
(Schützenregiment 2 ou SR.2) moins son IIIe
bataillon, et d'un groupe d'obusiers de 105 de FAR.74.
- celle du Sud, qui après le carrefour situé au
nord de Bertrix, doit aller par Jehonville, Paliseul... Elle comprend le bataillon
motocycliste (Krad.2), le III/SR.2, 2
groupes d'artillerie, le groupe antichars (Panzerjägerabteilung
ou PzJgAbt.38), la brigade de chars (PzBr.2), enfin
un bataillon de pionniers (Pi.38).
Le soir du 11 mai,
ces colonnes auront atteint respectivement Ochamps
et Paliseul... Mais les 56 autos blindées
du PzAA. 5 se répandent bien plus loin,
dans toutes les directions.
2 - LA 1ère PANZER, AU CENTRE
Vers 9 heures, alors
que le DD-DSE du capitaine Fontant est encore à l'est de Neufchâteau, vers Longlier,
une trentaine de chars allemands arrivent au sud-est de la ville, et s'arrêtent
momentanément parce qu'ils sont pris à partie par la batterie d'obusiers de 105
français en position à Petitvoir... Mais
la colonne de la 1ère Panzer reprend vite son mouvement...
Après avoir atteint Montplainchamps, un peu après 9h30, le PzR.2, régiment de tête, continue sa progression et
atteint Grapfontaine, puis Warmifontaine, un peu avant 11 heures. A 11h30, devant
Petit voir où les Français résistent, le PzR.2 demande des renforts. Le bataillon motocycliste
(Krad.1) lui est attribué, et rejoint la queue de la colonne du PzR. 2 à Grapfontaine.
Au sud de Petitvoir, près du ruisseau de
la Rosière, la batterie française de 105 du capitaine Leinekugel est en pleine action. Soudain, sur la
colline dominant l'est et de sud-est du village, apparaissent les chars
allemands, qui ouvrent aussitôt le feu. Le capitaine français a le poignet
arraché par un obus, et perd connaissance; ses artilleurs blessés se réfugient
dans la ferme Englebert.
D'après les archives
de la 1ère Panzer, on peut conclure que l'itinéraire de cette division,
parcouru par le PzR.2, régiment de tête,
passait par Witry, Traimont, Namoussart,
Offaing, le sud de Hamipré,
Montplainchamps, Grapfontaine, Warmifontaine, Petitvoir. Le PzR.1, qui suit le PzR.2,
atteint Grapfontaine à 14 heures, puis,
se plaçant à gauche (donc au sud) du PzR.2,
va occuper Biourge et Rossart, tandis que
le bataillon motocycliste de la division est à Nevraumont.
3. - LA 10e PANZER
Le soir du 10 mai, la 10e Panzer, l'IRGD en tête, avait atteint la ligne générale Marbehan-Poncelle. Mais la résistance de la 2e DLC française a été si forte - au point d'empêcher la
10e Panzer d'atteindre son objectif du jour: Florenville -, que les Allemands
modifient leurs ordres: déjà à 21h50 (22heures50,
heure allemande) le général Guderian, commandant
le XIXe Corps, a ordonné à la 10e Panzer
d'obliquer vers le Nord-ouest jusqu'à la ligne Léglise/Grapfontaine/Saint-Médard, puis de redescendre vers le
Sud-ouest pour aller passer la Semois dans
le secteur Cugnon-Mortehan. Ce qui va
donner lieu le 11 mai à des combats contre la Ire BC française (à Suxy contre le 4e escadron du 8e Chasseurs à cheval,
et à Straimont contre le 2e escadron du l
er Hussards) (43). Ces combats sont livrés à Suxy par l'IRGD,
dont la puissance de feu est extraordinaire puisque, en plus de ses deux
bataillons (le IIIe a été chargé de
l'opération Niwi), il possède 4
compagnies régimentaires d'engins d'appui:
- la 13e: 6 canons
d'infanterie de 75 mm - la 14c: 12 canons (le 37 et 4 Mi légères
- la 15e: 2 canons
d'infanterie de 150 min
- enfin une 16e (chose unique dans l'infanterie
allemande): 12 canons d'assaut: des pièces de 75 mm sur affûts chenillés
automoteurs
(43) A. BIKAR: La 1ère Brigade de Cavalerie fr-ançaise (1ère BC) dans les
Ardennes, les 10, 11 et 12 mai 1940. in Revue Belge d'Histoire militaire, n° de septembre
1989.
A Straimont, il
s'agit du SR.86.
Vers 19 heures, les
véhicules de transport ayant enfin rejoint, l'IRGD
se reforme en colonne à Suxy et progresse
vers le Nord-ouest, c'est-à-dire Wautiénaut.
Le soir, le Ier bataillon cantonnera à Saint Médard, de même que le groupe de reconnaissance
de la 10e Panzer (PzAA.90); le IIe bataillon arrivera à Saint-Médard dans la nuit du 11 au 12 mai.
La limite latérale
commune entre les 1ère et 10e Panzer, non
fixée le 10 mai, passe le 11 mai par Les Fossés, mais le 12 mai à 2 heures du
matin, par ordre du commandant de la 10e Panzer, ses unités peuvent aller
jusqu'à la ligne Grapfontaine-Orgéo. Cela
ne fait qu'entériner une situation de fait, car déjà le 11 mai, à Straimont et Martilly,
ce sont des éléments de la 10e Panzer (probablement le PzAA, 90 et des renforts en fusiliers et chars) qui
ont attaqué les Français.
A. BIKAR
Lieutenant-Colonel Hre, Ancien chef de la Section Historique des Forces Armées
belges.
ANNEXE 1
COMPOSITION DE LA 5e DIVISION LEGERE DE
CAVALERIE (5ème DLC) ET DE SES
RENFORTS, POUR LES OPERATIONS EN
BELGIQUE
I. - UNITÉS ORGANIQUES DE LA 5ème DLC
6e Brigade de Cavalerie (6e BC), à
cheval:
- 11 e Cuirassiers
- 12e Chasseurs à cheval
Chacun à -
2 groupes d'escadrons de fusiliers (GE):
Ier GE: 1 er et 2e escadrons, chacun à 4
pelotons à 2 FM
IIe GE: 3e et 4e escadrons, chacun à 4
pelotons à 2 FM.
- un Se escadron de Mi et engins (EME):
- 8
Mi (2 pelotons à 2 groupes de 2 Mi
- 4 canons de 25 antichars (1 peloton)
- 4 mortiers de 60 mm (1 peloton)
Remarques: au 12e Chasseurs à cheval, 2
pelotons du 4e escadron sont cyclistes; et, au 11e Cuirassiers, un escadron est
cycliste.
15e Brigade Légère Mécanique (15e BLM) (1):
- 5e RÉGIMENT D'AUTOS-MITRAILLEUSES (5e RAM), à 2 groupes de 2
escadrons:
Ier GE: -
ler escadron «de découverte»: 14 autos-mitrailleuses de découverte (AMD)
- 2e
escadron motocycliste (4 pelotons de 13 side-cars; et 1 mbrtier de 60)
IIe GE: -
3e escadron «de combat»: 14 autos-mitrailleuses
de combat, remplacées à la 5e DLC par des
chars Hotchkiss
- 4e
escadron, motocycliste (comme le 2e)
- 15e RÉGIMENT
DE DRAGONS PORTÉS (15e RDP), à 2 bataillons (Ier
et IIe) identiques, chacun à 3 escadrons:
- au Ier
bataillon:
- ler
escadron mixte d'autos-mitrailleuses de
reconnaissance (AMR) et motos
- 2e escadron de fusiliers portés, sur
voitures à 6 roues tous terrains
- 4e escadron de Mi et engins (8 Mi, 4
canons de 25, 4 mortiers de 81 mm)
- au IIe
bataillon: 5e, 6e et 8e escadrons, respectivement comme les 1er, 2e et 4e
NB: il n'y a pas d'escadrons portant les n° 3 et 7.
- 78e RÉGIMENT D'ARTILLERIE (78e RA) à 2 groupes:
Ier : 3 batteries de 4 canons de 75 Tracté Tout Terrain
IIe: 3 batteries de 4 canons de 105 C sur
trains rouleurs
- 5e ESCADRON DIVISIONNAIRE ANTICHARS (5e EDAC, administré par le 5e RAM):
3 pelotons de 4 canons de 25, transportés
sur voitures à 6 roues
-
10e BATTERIE
DIVISIONNAIRE ANTICHARS (10e BDAC, administrée
par le 78e RA):
4 pelotons de 2
canons de 47.
- Compagnie de Sapeurs-mineurs No 34/1 à 3 sections: 1 section moto,
1 sur camionnettes, 1 sur camions GMC de
2 tonnes, tous terrains (TT).
-
Des unités des Services:
Compagnie mixteradio-fil (transm) n°
34/84,
Compagnie hippomobile n° 34/9
Compagnie automobile n° 134/9
Groupe d’Exploitation Divisionaire
(intendance) N) 31/9
Groupe Sanitaire Divisionnaire n° 34
Groupe Aérien d’Observation n° 507.
.
(1) Ces brigades des DLC, autres que celles à
cheval, sont appelées Motorisées par certains auteurs, ou Mécanisées par d'autres comme Ornano. En fait elles sont
les deux à la fois: motorisées (motocyclistes et dragons portés), et mécaniques
(AMD, AMR, chars).
II. - UNITÉS EN RENFORT
Il s'agit d'unités
du Xe Corps du général Grandsard, en
position à la Meuse dans la zone de Sedan:
55e DI à gauche, 3e DINA (DI nordafricaine)
à droite, et 71e DI à 60 Km à l'arrière,
en réserve de la 2e Armée. Mais cette DI a
laissé certains éléments à Sedan, notamment
son groupe de reconnaissance, et il est prévu qu'en cas d'alerte elle sera
intercalée entre les deux autres.
1. - Groupes de Reconnaissance (GR):
- 60e GRDI (de
la 71e DI)
- 64e GRDI (de la 55e
DI) chacun à 3 escadrons: 1er à cheval, 2e moto, 3e de Mi et engins (8 Mi et 2
canons de 25)
-12e GRCA (du Xe
Corps), à 2 groupes:
- Ier
à cheval, à 2 escadrons (1er et 2e) renforcés par des Mi, des mortiers et des
canons de 25
- IIe, motorisé, à 2 escadrons: le 3e motocycliste, et
le 4e de MI et engins (8 Mi, 1 mortier de 60 mm et 4 canons de 25)
matériel roulant: 22 voiturettes et 67 motos,
remplaçant les side-cars prévus.
2. - Infanterie: Ier bataillon
du 295e RI, de la 55e DI, et IIIe bataillon du 12e Zouaves, de la 3e DINA
3. - Génie:
3 compagnies et demie, du Xe Corps. Pour les destructions à opérer en
territoire belge, et la pose de mines (57 dispositifs sur routes). Ces
compagnies sont transportées en camions.
ANNEXE 2
ORDRE DE BATAILLE DES OFFICIERS DE LA
5e DLC ET DE SES RENFORTS
D'après les archives de la 5ème DLC. Cet ordre de bataille est incomplet, et renferme
certainement quelques erreurs dues notamment à des mutations intervenues très
peu de temps avant le 10 mai 1940.
Remarques:
1. A la cavalerie,
les commandants de groupes d'escadrons sont des chefs d'escadrons, appelés
commandants (comme les commandants des bataillons d'infanterie);
2. Les chefs de peloton sont des
lieutenants, sous-lieutenants, aspirants, ou adjudants-chefs. Si, pour un
escadron, nous mentionnons plus de 4 chefs de peloton, c'est que certains sont
en surnombre, ou bien que, par suite de départs et d'arrivées à l'époque de mai
1940, les archives mentionnent plus de 4 noms, sans que nécessairement il y en
ait eu plus de 4 simultanément à l'unité.
5e DLC
- ETAT-MAJOR DE LA DIVISION:
général Chanoine, commandant la division.
- 6e BRIGADE DE CAVALERIE (6e BC): général
Brown de Colstoun, capitaine Bruyant, Lt Grégoire Ste Marie (2e bureau), slt Leaute (officier de renseignements du «Corps»?).
11e Cuirassiers: colonel Labouche
Ier groupe: capitaine Finaz
1er escadron: capitaine Beau; pelotons Malivel, Ortoli, Binder, Prételat, Felici, Lt Bridoux (4e peloton)
2e escadron: capitaine Grognet; pelotons Thomas, Rotschild, Meaudre, Venturini
IIe groupe: commandant Le Balle
3e escadron: capitaine Pillafort; pelotons Saint-Mathieu, Lancien
4e escadron: Lt Cavalie; pelotons Wattinne,
De Wawisky, Lentie
5e escadron (de Mi et canons): capitaine Seguin; pelotons Herant,
Schmitt, Rouzée.
12e Chasseurs à cheval: colonel Lesne
Ier groupe: commandant Richier
ler escadron: capitaine Demazin; pelotons de Fournaux la Chaze, Le Beau de la Morinière, de Blanchonval,
Ceccaldi
2e escadron: capitaine Ethuin; pelotons Dorange,
Bazaille, de Franqueville, Clobus,
Monnaert, Baijot, Maroy
IIe groupe: commandant Robitaille
3e escadron: capitaine Dumas de Champvallier;
Lt de la Chapelle, slt Manet,
adjudant-chef Masset
4e escadron: capitaine Bouhet; pelotons Marzloff, de Tassigny, Thoreau la Salle, Richard
5e escadron: capitaine de Grétry; pelotons Gevardat
de Fombelle, Lacave, L'Huillier,
Fournier, Bigot, Thousin.
- 15e
BRIGADE LÉGÈRE MÉCANIQUE (15e BLM): colonel
Evain, capitaine Gailly de Taurines; capitaine de Gayardin de Fenouyl
(2e et 3e bureaux), Lt Desouches (1er et
4e bureaux); Lt Millot (Transmissions),
Lt Sainfort (et du QG).
5e Régiment d'Autos-mitrailleuses (5e RAM): colonel Le Pelletier de Woillemont
Ier groupe: commandant Rougier
ler escadron (d'AMD): Lt du Tertre; pelotons Zagrodski, Stein, Da, Delaunoy
2e escadron (moto): capitaine de Canchy; pelotons de Casteja, du Boutiez, Loue, Toussaint
IIe groupe: commandant Berges
3e escadron: Lt Picquart; pelotons Loiseleur, Sabatié, Guignard, Brosse du Plan
4e escadron (moto): capitaine de Chabot; pelotons Koltz,
Joubast, Roulet, Baudouin.
15e Régiment de Dragons Portés (15e RDP): colonel
Chaumont-Morlières
Ier bataillon: commandant Fontaine
ler escadron (AMR et motos): capitaine Fontant; pelotons Babouin, Combet (2e pel.
d'AMR), Glasberg, Isaac
2e escadron: capitaine Casati-Ollier; pelotons Bois, Ize, Michaud, Salva
4e escadron: capitaine de Truchis de Lays;
pelotons Miraillet, Diot, Louchet, Agniel, Pujos.
Lt Nerard
(Esc ?)
IIe bataillon: commandant d'Arras
5e escadron (AMR
et motos): capitaine Ribes; pelotons de Villelume, Longin, Faucher
6e escadron: capitaine Vincent; pelotons Nerson, Chevallier, Sans, Roche
8e escadron: capitaine de Truchis de Varennes;
pelotons Dubois, Fornex de Mouges, Dubel, Damour.
78e Régiment d'Artillerie
Ier groupe: ?
IIe groupe: capitaine Leinekugel (?),
Lt Rivet.
10e Batterie de canons de 47 antichars
5e Escadron divisionnaire antichars
(canons de 25)
Capitaine Estaniol; Lt Martin, slt Saby, aspirant Hanus.
Cie de Sapeurs-mineurs 34/1
Capitaine Lopin, sergent-chef L'Ommes
Section moto: Lt Brunelle; sergent-chef André
Section camionnettes: SLt Toussaint
Section tout terrain (TT): adjudant-chef Coudert.
RENFORTS
12e GRCA:
Lt-colonel Crémière; capitaine Bouillard
(adjoint), capitaine Simonin (renseignements), Lt Morhet (transmissions), Lt Plailly (officier des détails)
Escadron hors rang: capitaine Delacour
Ier groupe: commandant de Boissesson
1er escadron: Lt Dollais; pelotons Le Mas, Roche, Rivain, Mairesse, Zeutz d'Alnois
2e escadron: capitaine Lescot; pelotons Bonduelle, de Laurens, Gillette, Daumesnil
Ile groupe: commandant Mouton
3e escadron: capitaine Lebel; Lt Josset, Guillerie, Hachette
4e escadron: capitaine Desvergnes; Lt Marchand, de Montenit,
Bourel.
60e GRDI: Lt-colonel
du Passage
ler escadron: capitaine André; Lts Delisée, Laguette
2e escadron: capitaine Saulnier-Blache; Lt de la Morandière
3e escadron: capitaine Arthuys.
64e GRDI:
Lt-colonel Mallet; capitaine Hallier, capitaine Girade, Lt Parouty, Lt Cornilleau
(transmissions), Lt Bernier, Lt Barbier,
Lt Monchicourt; médecin-Lt Devallée
1er escadron: capitaine Gerdes; Lt Gaullier, Benoist d'Azy, SLt Joffre, aspirant
de Vansay
2e escadron: Lt Plotter; Lt Reverdy, Paulmier, aspirants Meyer, Lefèvre
3e escadron: Lt de la Rochetterie; Lt Berger, de Toulgoët,
de Pommereau (groupe Mi), Garnier (canons
de 25).